Réflexions sur la critique d’art en Haïti
Dans un monde idéal, tout mouvement artistique s’accompagne d’un mouvement parallèle de la part de la critique. Cependant, en Haïti, cela a rarement été vrai. Ce n’a pas été le cas pour le mouvement indigéniste en peinture [1] (1930-1940), le premier à réellement proposer un projet artistique. Pourtant, ce mouvement était souhaité par les littéraires qui voulaient affirmer une identité nationale. Alors, pour défendre l’idéal indigéniste, totalement opposé à une aliénation menaçante, quelques textes publiés dans les journaux locaux critiquaient vertement ces « pastiches d’écoles » [2] qui, en réalité, ne s’adressaient qu’à un public très restreint fait de parents et d’amis proches.
William Scott (1884-1963)
Paysage de Kenskoff c1930
Huile sur panneau
Coll. particulière
Ces écrits pourtant auraient pu faire savoir que la copie, en soit, n’est pas condamnable tant qu’elle est proposée dans le cadre de l’apprentissage. Ils pourraient aussi constater l’absence de lieux culturels dont la fréquentation permettrait de prolonger cette formation. Ils auraient pu insister surtout sur le fait que cette absence d’infrastructures était une entrave au développement des arts plastiques dans le pays.
Pétion Savain (1906-1973) avait suivi des cours d’art dans une école congréganiste. Il est le premier artiste de la période post-occupation américaine à vouloir faire carrière dans les arts. Sa rencontre avec l’œuvre de l’artiste afro-américain William Scott [3] allait changer sa vie. Scott peignait Haïti et son peuple comme lui, Savain, aurait voulu le faire.
D’une demoiselle Riobé
Madone d’après la Verge à la Chaise de Raphaël
Crayon mine sur papier
35 X 28cm (14″ X 11″)
Coll. particulière
Et, si avec seulement quelques notions de base il a choisi de tout abandonner au profit de la peinture, c’est qu’il était déterminé. Les artistes ayant mauvaise réputation dans le milieu à l’époque, la presse locale comprenait mal ce choix et ne savait pas quoi dire. Elle a seulement fait savoir que « ce jeune artiste s’adonne à la peinture, aux techniques de l’aquarelle et à la gravure » [4].
Savain fréquentait les cercles littéraires de l’époque, et malgré son amitié avec le célèbre écrivain et poète Jacques Roumain (1907-1944) qui lui passait des livres sur l’art, ce dernier n’a jamais écrit un commentaire sur son travail. Le poète Léon Laleau (1892-1979), qui lui achetait de temps en temps une œuvre, n’a pas non plus commenté la peinture de Savain. Ce n’était pas de la mauvaise foi de leur part. Peut-être qu’ils estimaient que les œuvres pouvaient se passer de justificatif. Rarissimes étaient donc des commentaires comme celui-ci : « Les tableaux de Savain exaltent la nature haïtienne dans son infinie variété. Elles sont autant de pages d’un grand livre d’art que les générations présentes et à venir ne cesseront pas de feuilleter pour mieux apprendre dans quel sens doit tendre le beau national. » [5] C’est un encouragement certes, mais plus que cela, ce commentaire montrait que Savain pouvait effectivement être celui qui illustrerait les idées de l’Indigénisme comme le souhaitait Roumain. Vantant le « Beau National », ses peintures pouvaient rendre le Haïtien fier.
La presse locale, n’ayant pas l’assurance nécessaire pour se prononcer sur l’œuvre de Savain, a alors choisi de publier les opinions d’artistes afro-américains de passage en Haïti au début des années 1930. Eleanor Bourdin trouvait que Savain « exprime bien le mouvement moderne qui tend vers l’art national ». Le peintre Douglas Brown, affirmait que Savain aurait du succès aux États-Unis parce que disait-il : « On aime les choses indigènes » [6].
Pétion Savain (1906-1973)
Marché sur la colline
Huile sur toile
53,9 X 77, 47cm (22″ X 30″ ½)
Art Museum of he Americas, Washington DC
En effet, un tableau de Savain : « Marché sur la colline » [7] a été primé en 1939 au concours international de la IBM et présenté la même année à l’exposition universelle de New York. En Haïti, cette reconnaissance internationale, une grande première, n’a eu aucun écho. Exposé au Cercle Port-au-Princien le19 septembre, le tableau a été vu, dit-on, par un public imposant. Certains qui trouvaient l’œuvre originale, se demandaient si elle ferait bonne figure au milieu des représentations des autres pays. Ils attendaient donc des nouvelles de l’inauguration de l’exposition le 30 avril 1939 pour être rassurés. Hélas, le grand reportage que publiait Le Nouvelliste le 10 mai, ne donnait que la composition de la délégation haïtienne à cette manifestation [8]. Rien du tableau de Savain. Nous sommes ici face à une réalité : les organes de presse n’ayant pas de chroniqueurs versés dans les questions relatives à l’art, ceux qui sont désignés pour couvrir les expositions ne peuvent que produire une chronique mondaine.
Philippe Thoby Marcelin (1904-1975) poète, romancier, journaliste, homme politique avait les compétences nécessaires pour remplir le rôle de critique d’art. Il prenait des notes sur les activités du monde artistique en Haïti qu’il publiera plus tard dans son livre Panorama de l’Art Haïtien, le premier ouvrage sur l’art haïtien écrit par un Haïtien. Il a bien connu Savain et pour en parler, il a pensé avoir recours à des comparaisons pour aider à la compréhension de ses propos. Il n’a pas hésité, par exemple, à rapprocher la fraicheur du sentiment et des maladresses de métier des débuts de Savain à Henri Rousseau. Puis, constatant que l’œuvre de Savain avait évolué, le plaçant dans une catégorie pré moderne, Thoby-Marcelin a voulu l’associer à certains peintres européens, question de le situer dans des séquences historiques qui ont conduit à l’art moderne. C’est ainsi qu’il a vu la peinture de Savain comme une créolisation de celle de Vlaminck, de Lhote ou encore de celle de Dunoyer de Segonzac. On peut trouver un peu pédante l’extrapolation par laquelle il tend à associer l’aspect romantique de l’œuvre de Savain à celle plus dramatique de Vlaminck. Selon lui, Savain serait par le tempérament peut-être le plus proche d’André Lhote, un intellectuel qui cherche un langage plastique nouveau sans pour autant renier la tradition. Savain n’ayant toutefois pas la grande culture artistique d’un Lhote, il n’a pas, comme lui, élaboré de théories sur la peinture. L’écrivain qu’était, Savain [9] n’a jamais consigné, voire publié, des réflexions sur cette peinture qu’il voulait nationale. Signalons que de tels rapprochements que pouvait se permettre Philippe Thoby Marcelin ont malheureusement créé, chez des profanes des générations suivantes, la fâcheuse habitude de comparer leurs amis, à des artistes reconnus mondialement. Une opinion comme « C’est le Picasso haïtien » ne pouvait que prendre l’allure d’un fantasme saugrenu.
C’est un nommé Max Martinez qui commentait l’exposition présentée à l’inauguration du Centre d’Art, à Port-au-Prince, le 14 mai 1944. Bien entendu, l’auteur saluait Dewitt Peters, le directeur fondateur du Centre, et mentionnait aussi tous ceux et celles qui y ont apporté leur concours. Mais ce qui fait la valeur de ce document, c’est la rigueur du regard critique avec lequel l’auteur parle de quelques-unes des œuvres qu’il a jugé majeures. Dû certainement aux limites qui lui étaient imposées par le journal, certains artistes ont été simplement mentionnés en notant toutefois l’importance de leur contribution au succès de cette exposition [10].
Antoine derenoncourt (1909 – 1951)
Rara
Huile sur toile
43,5 X 54cm (17″1/8 X 21″¼)
Coll. particulière
Les artistes du mouvement indigéniste espéraient trouver dans ce Centre d’Art de Port-au-Prince, l’institution qui leur donnerait l’encadrement qui leur était nécessaire et qui surtout parviendrait à initier le public, à former son goût. Au départ, les propos du directeur semblaient encourageants car il disait vouloir préparer l’épanouissement de l’École Haïtienne annoncée heureusement par les Indigénistes. A cette époque, il y avait au Centre ceux qui restaient fidèles au « typique » dans un réalisme qui se voulait photographique. Ce goût du typique et l’aspect répétitif des œuvres qu’il ne pouvait qu’engendrer, menaçait d’asphyxier les autres artistes qui se voulaient « modernes ».
Maurice Borno (1917-1955)
Paysage
Huile sur toile
50,8 X 61cm (20″ X 24″)
Coll. particulière
Il faut dire que l’exposition au Centre d’Art, en 1945, d’œuvres de l’avant-garde cubaine [11] avait déclenché chez eux une prise de conscience de la situation réelle de la peinture haïtienne, de ses lacunes, de ses problèmes. Est-ce pourquoi le critique cubain José Gomez Sicré les trouvait anxieux dans la recherche de voies qui conduiraient à leur épanouissement, mais plus encore qui leur permettraient d’asseoir cette expression raisonnée dont il voulait faire l’essence de leur art [12].
Bien qu’elle ait été une entrave difficile à surmonter pour tous, on a vu les artistes des deux groupes réagir différemment à l’arrivée au Centre des peintres populaires. Hector Ambroise (1904-1962), l’un des tout premiers peintres indigénistes était si confiant qu’il a introduit le mouvement à Jacmel, sa ville natale, avec la Société des Trois Arts. Il exprimait ainsi sa déception « …à l’époque de la formation du Centre d’Art il avait été question de promouvoir l’éclosion d’une peinture haïtienne (or) nous constatons que ce qu’on y étale comme peinture haïtienne est d’un genre plutôt spécial ne pouvant qu’être un sujet de propagande contre l’art de chez nous » [13]. Lucien Price (1914-1963), avec plus d’ouvertures, fin observateur du travail de ces confrères populaires, artiste qui peu après adoptera irréversiblement l’abstraction, commentait ainsi le travail de l’aquarelliste, Jean Baptiste Bottex (1918-1979), originaire du nord du pays :
Jean Baptiste Bottex (1918-1979)
Loin de la ville
Aquarelle sur papier
Disparu durant le tremblement e terre
Coll. Centre d’Art
« D’une touche un peu naïve, le dessin se révèle très expressif. Ce caractère, rehaussé par des couleurs aux nuances paisibles sagement réparties, donnera aux travaux de Bottex la franchise et la délicatesse des bonnes estampes. …Port-Margot compte parmi ses fils, l’un des meilleurs peintres populaires. » [14] On saura plus tard que les artistes modernes comme Price puiseront dans l’art populaire des données qu’ils estimaient pouvoir définir une esthétique haïtienne.
Il faut noter que le Centre, souhaitant assurer la formation du public, avait créé en 1945 un organe de diffusion : Studio 3 [15]. On pouvait y lire des détails sur les activités du Centre, des commentaires d’artistes du Centre sur les expositions de leurs pairs, ou encore les opinions de personnalités amies de la direction du Centre. On y trouvait quelques textes théoriques comme L’artiste et la collectivité et De l’élaboration de l’œuvre . La publication bénéficiait aussi de la collaboration de spécialistes étrangers [16].
Philomé Obin (1891-1986)
Levée de l’occupation d’Haïti par les USA
Hhuile sur carton
43,18 X 60,9cm (17″X 24″)
Coll. particulière
Le 24 février, avant même l’inauguration du Centre, Philomé Obin (1891-1986) fit parvenir à ses dirigeants un tableau. Ancien teneur de livres dans sa ville natale : le Cap haïtien, ils s’adonnaient, dans ses moments de loisirs, à l’art de peindre. Peters notait alors dans son journal : « C’était ma première expérience de la peinture populaire haïtienne et je ne savais trop comment l’apprécier.» [17] C’est Gomez-Sicré qui lui fit comprendre l’intérêt de ce type de peinture. Il connaissait bien l’expérience de la « Escuela Libre » réalisée dans son pays en 1937 [18]. Respectant alors son souhait d’ouvrir le Centre à tous, sans distinctions aucunes, Peters a encouragé des nouveaux enrôlés en leur fournissant le matériel nécessaire pour qu’ils puissent créer « librement ». Ce geste lui a valu d’être considéré par la critique américaine comme étant un faiseur de miracle. Alors, jouant son nouveau rôle du mieux qu’il pouvait, Peters déclara dans une interview à la radio jamaïcaine en 1952 qu’à sa connaissance, à son arrivée en Haïti « il n’y avait pas d’art » [19]. Il niait ainsi l’existence de ce mouvement dont il voulait assurer le développement et oubliait du coup les artistes dont les œuvres : peintures à l’huile, aquarelles et dessins, étaient présentées dans l’exposition inaugurale du Centre. Les plans de départ avaient donc changé.
La vérité est qu’en Haïti on savait fort bien qu’il n’y avait pas eu de miracle. Mais personne ne l’a dit. Même si elle n’était pas appréciée, tous savaient que la peinture populaire que découvrait Peters existait bel et bien et ceci depuis des années. Sans lui, elle aurait sûrement évolué en fonction de l’état des techniques et des mentalités à l’intérieur du groupe social qui l’a produite et auquel elle était, en principe, destinée. Ce qu’a fait Peters c’est accélérer la production de telles œuvres que des promoteurs ont proposé à un marché étranger capable d’absorber ces œuvres qui répondaient à des critères autres que ceux de l’art savant. Mais, il y avait plus que cela, et, face à l’inexistence d’une critique haïtienne, l’étranger a élaboré un plan astucieux, baptisé Renaissance in Haiti , dont on peut, aujourd’hui encore, ressentir les effets. Edward Sullivan, professeur et chercheur à New York University, reconnaît que cette promotion de l’art haïtien dit primitif a servi à créer l’un des stéréotypes les plus puissants dans les études d’art caribéen. La visibilité durable de ce concept non seulement jette de l’ombre sur les trajectoires de l’art haïtien avant le Centre d’Art, mais elle a peut-être également façonné les tendances de collections et d’expositions en faveur des types d’art « non formés » que le Centre d’art poussait [20].
Dans le public haïtien, on parlait beaucoup des maladresses de cet art « populaire ». On parlait surtout de la mainmise de la critique américaine sur cette « découverte » qui faisait croire qu’Haïti était « le seul pays dont la production artistique est entièrement représentée par des œuvres d’artistes naïfs, primitifs non seulement par leur approche, mais aussi par leur manque total de formation académique » [21]. Le critique américain Selden Rodman [22] qui, s’était imposé au Centre d’Art, est vu comme le cerveau de cette campagne de promotion de la peinture primitive haïtienne. Paul Waggoner, chroniqueur et galeriste de Chicago, dans un article publié en 1988, reprenait les propos de Rodman qui trouvait, dans « les créations de ces primitifs d’une culture sous-développée, cette émotion, ce ravissement tel qu’on le trouvait dans la pré-Renaissance italienne » [23]. Pour sa part, le critique américain Marc Steven, tout en reconnaissant qu’il n’y avait pas que de l’art primitif en Haïti, notait que « les artistes qui ignoraient les conventions occidentales étaient les plus séduisants» [24] et, parlant de ceux qui embarquaient dans les courants modernes, il écrivait « Plus ils peignent comme nous, moins ils pourront être eux- mêmes » [25]. On comprend pourquoi les artistes modernes qui se sont exilés dès la fin des années 1950 ont eu du mal à se faire accepter à l’étranger.
Hector Hyppolite (1894-1948)
Congo Queen
Peinture domestique, huile et crayon
(50.9 x 70.1 cm (20 x 27 5/8″)
Museum of Modern Art, N.Y.
Le Centre d’Art recevait la visite d’importantes personnalités du monde. Roland Dorcély (1930-2017), alors adolescent, s’en souvient comme « des gens venus d’une autre planète. Nous n’arrivions pas à déchiffrer leur langage » disait-il [26]. Faisant jouer ses relations aux États Unis, Peters a fait venir des artistes américains qui donnaient des cours ou offraient des classes de maître aux artistes dits « modernes ». En guise d’honoraires, il leur était offert la possibilité d’exposer dans les salles du Centre. Mais, de tous ces visiteurs étrangers, André Breton, père du surréalisme français, a été incontestablement le plus célèbre. De tous les tableaux qu’il a pu voir, ce sont ceux d’Hector Hyppolite qui ont retenu son attention et, les ayant commentés favorablement, il a propulsé leur auteur au rang de vedette. Parce que ce serait bon pour la publicité, Peters et des critiques américains ont immédiatement fait croire qu’Hyppolite était le leader du mouvement primitif. Participant à l’exposition de l’été 1946 au Centre, Hector Hyppolite recevait deux prix, le premier dans la catégorie populaire, le second pour l’ensemble des œuvres en compétition. Studio 3 qui fournit cette information ne dit pourtant pas sur quelles bases les œuvres avaient été jugées. Des intellectuels haïtiens de leur côté, étaient fiers du fait que ce peintre populaire mystérieux pouvait contribuer au mouvement surréaliste français comme le suggérait Breton. La mort prématurée d’Hyppolite a été l’occasion de lui consacrer quelques articles dans la presse locale. Ceux-ci, cependant, ne se sont pas intéressés aux qualités plastiques de sa peinture, ni à son langage symbolique, ni aux options esthétiques qu’il eut à prendre. Ils ont de préférence considéré l’homme, ses rapports aux lwa du panthéon vodou, ses fantasmes. On pouvait alors trouver dans ces textes tout ce qu’il fallait pour faire entrer Hector Hyppolite dans la légende.
Dans la deuxième moitié des années 1940, le programme d’expositions au Centre d’Art était chargé. Cependant, seule l’exposition No, 47, était consacrée à l’Art Populaire. La majorité d’entre elles étaient des expositions individuelles ou collectives d’artistes héritiers de l’indigénisme ou modernes. Rares sont celles qui ont bénéficié de commentaires écrits.
Jean Parisot (1918-1999)
Sémaphore
Huile sur toile
61, X 30,5cm (24″ X 12″)
Fondation M. & G. Nader
Jean Parisot (1918-1999) avait suivi les cours d’art offerts par l’Institution Saint Louis de Gonzague. Il y avait même exposé. Il a été le premier artiste à qui Peters avait communiqué son projet d’un centre d’art. Rentré entre-temps dans les ordres, un hommage lui a été rendu, en 1947, lors d’une exposition individuelle dans laquelle était montré son tableau Le Sémaphore, une allégorie qui faisait référence à la levée de l’occupation américaine d’Haïti. Commentant cette exposition, le critique Fraenel notait qu’il fallait le « ranger parmi ceux qui veulent d’abord, à travers tout, exprimer leur moi, célébrer leurs passions, conter leurs rêves, voire leur cauchemars…but suprême de l’art » [27].
C’est sous la plume de Lucien Price, artiste lui-même, que Studio 3 publiait les commentaires de l’expo, en 1946, d’œuvres de Maurice Borno (1917-1955), Luce Turnier (1924-1995), Raoul Dupoux (1906-1988). De Borno il écrivait : « Dans son dessin, Borno amplifie, rétrécit, abrège volontairement forme et volume. Ce procédé lui donnera l’avantage de pouvoir établir, localiser sur des plans, délimités parfois jusqu’à l’arbitraire, des harmonies imprévues dont les qualités : empattement, teintes, luminosité seront mis en relief. » Sa conclusion : « une exposition qui révèle un vigoureux talent de peintre. » S’attardant sur le tableau Coq de Combat de Turnier, il notait : « on peut regretter un parti-pris décoratif accusé par un fonds ayant peu de rapport avec les premiers plans. » Mais, dans l’ensemble, il concluait que « c’est une exposition qui classe son auteur au premier rang de nos peintres ; résultat appréciable, si l’on veut songer qu’il y a de cela environ deux ans, Luce Turnier ignorait tout de la peinture et du dessin. » De Dupoux, il notait ses « préférences et un goût marqué pour le paysage (qui) a permis aux visiteurs d’apprécier son talent, ses qualités de peintre et la diversité de ses moyens d’expression : l’huile et aquarelle, par des travaux évocateurs de l’opulence et du charme ensoleillé des beaux sites jérémiens [28] (de Jérémie, sa ville natale, dans le sud du pays). Par contre, en 1947, lorsque dans une exposition individuelle, Lucien Price faisait voir ses avancées qui franchissaient les limites du conventionnel, il n’a eu comme seul commentaire dans une publication locale: « Je ne comprends pas » [29].
Alors qu’en janvier 1949, la presse locale rapportait le succès éclatant remporté aux États-Unis par des artistes primitifs haïtiens, lors d’expositions réalisées avec le concours du Département du Tourisme [30], le 20 de ce même mois, Max Pinchinat, exposait ses œuvres au Centre d’Art. Prévoyant le mutisme de la presse, il prenait les devants et se présentait, lui-même et son travail, dans un texte qui était distribué aux visiteurs : « Dès mes débuts, il m’a paru que l’enseignement académique ne cadrait pas avec le tempérament haïtien… Je n’entrevoyais pas encore l’intérêt des primitives haïtiens mais j’avais l’intuition qu’au travers des principaux courants picturaux modernes je découvrirais un art dérivé du magnétisme de l’art nègre et conforme à mon tempérament. » [31] Cette absence de la critique en Haïti, cette indifférence du public lors de son exposition, avaient poussé Max Pinchinat à entreprendre, dès 1949, une collaboration avec le quotidien Le Nouvelliste, l’hebdomadaire Notre Temps, la revue Optique et Conjonction, la revue de l’Institut Français d’Haïti.
Déjà dans un rapport de 1947, Maurice Borno, l’administrateur du Centre, faisait les constatations suivantes : « Une institution comme le Centre ne peut se soutenir de reconnaissance internationale sans l’apport de facteurs plus positifs venant du pays. L’admiration suscitée à l’extérieur n’a pas cependant su soulever en Haïti un intérêt plus vif et ceci se reflète dans la fréquentation des galeries par le public ». Borno posait alors la question : « Le Centre d’Art aurait-il fait faillite dans son rayonnement en Haïti ? » La réponse est venue plus tard, en 1950, l’année de la rupture et celle de la création du Foyer des Arts Plastiques.
En aout 1950, le quotidien Le Nouvelliste publiait une série de notes pour tenter d’expliquer le malaise que connaissait le Centre d’Art. Certaines étaient signées par l’Association des Artistes Haïtiens (AAH) où l’on pouvait lire les noms des artistes qui allaient créer le Foyer des Arts Plastiques, inauguré le 11 août de la même année. Quelques jours après, dans une petite note en bas de la première page, on pouvait lire : « Les membres de l’Association des Artistes Haïtiens ont déclaré avoir rompu avec le Centre d’Art et ont fondé, à Port-au-Prince, une association artistique sous le vocable : Foyer des Arts Plastiques [32]. Comme promis, le 18 août en dernière page, le journal publiait l’intégralité de l’acte fondateur du Foyer. On apprenait alors que le comité directeur était formé de Max Pinchinat, de Lucien Price et de Jean Chenet.
La première grande exposition du Foyer a été inaugurée le 17 septembre 1950 au Pavillon des Beaux-Arts dans la cité du Bicentenaire. Une note parue dans Le Nouvelliste 21 septembre nous apprend que l’exposition proposait une randonnée à travers l’histoire de la peinture haïtienne contemporaine pour se faire faire une idée complète de ses diverses tendances. Cette exposition, précise la note, a attiré un grand nombre d’intellectuels, d’écrivains et d’amants de l’art.
Détail intéressant, il est dit que, dans l’exposition, on pouvait aussi voir les œuvres très remarquées de Yole, épouse de Paul Magloire, Colonel, candidat à la présidence [33].
Le Foyer des Arts Plastiques présentait peu après un manifeste dont des extraits ont été repris par Michel-Philippe Lerebours dans Haïti et ses peintres de 1804 à 1980 [34]. On peut y lire que « le devenir de l’artiste haïtien ne doit en aucune façon être assujetti à une cristallisation hâtive imposée par le désir de satisfaire à tout prix les tendances de l’heure. » Ce manifeste prône aussi des ouvertures au monde et surtout le fait que « si le folklore est une source riche d’inspiration, il ne doit pas être la seule. » Jean Chenet reprenait l’idée que l’art ne peut pas, ne doit pas être statique… qu’il fallait recréer l’échelle des valeurs artistiques du pays. Au Foyer, la fâcheuse distinction entre primitifs et modernes serait éliminée et tout le monde devait avoir droit à l’enseignement des arts, à l’information sur les différents courants contemporains et antérieurs. [35] Tous seraient alors libres de choisir ce qui leur convenait au mieux.
La décision prise par les membres de l’AAH de quitter le Centre d’Art n’a pas été un geste anodin. Il aurait dû donner lieu à des débats qui, pour l’histoire, seraient publiés dans la presse locale. En ce faisant, ces artistes prenaient le risque de se marginaliser. En théorie, un tel geste peut avoir des effets positifs en mettant le groupe, au centre d’un milieu dynamique, évolutif. N’est-ce pas ainsi que sont apparus tous les « ismes « qui ont marqué l’évolution de l’art dans le temps. Mais, en remontant le temps, on peut voir que de telles actions ont presque toujours créé le scandale avant la consécration.
Lucien Price 1915-1963
L’Homme au Balai
Fusain sur papier
22 X 28cm (8½ » X11″)
Coll. Particulière
Le premier effet créé par la création du Foyer a été celui de modifier la relation de ces artistes avec leurs contemporains et aussi et surtout avec la société. La critique aurait pu constater que des œuvres à contenu social existaient déjà en Haïti, dans des œuvres, à l’époque de très faible rayonnement, celles de Lucien Price et d’Andrée Malbranche par exemple. Leur contenu, réinterprété par les artistes du Foyer, était le même. C’est surtout la forme employée qui avait changé. On observe alors qu’au niveau du public, il y a eu un passage de l’indifférence au déplaisir.
Ce déplaisir, allant même jusqu’à un rejet systématique, est la preuve de la réaction émotionnelle au niveau de ce public nouvellement intéressé par la création artistique et qui se donnait le droit de porter un jugement. Il ne s’agissait plus de rejeter la maladresse des primitifs/naïfs mais de réagir aux choix formels qu’avaient faits les artistes du Foyer. Par ailleurs, en voulant donner à tous, les moyens de s’exprimer pleinement, le Foyer voulait arriver à la subjectivité de l’artiste. C’était là un objectif noble qui a été mal perçu, ou disons occulté, par des considérations politiques.
L’utilisation par Michel Philippe Lerebours de l’expression « réalisme de cruauté » [36] pour parler de la peinture du Foyer des Arts Plastiques traduit ce rejet de la société conservatrice en Haïti. Selden Rodman, très impliqué au Centre d’Art, a vertement critiqué cette peinture associant toute prise de position radicale dans le domaine de l’art à de l’extrémisme politique [37]. Les artistes du Foyer, dont les œuvres subissaient un jugement dénué de toute valeur esthétique, ont été alors vus comme des activistes politiques, une notion qui, dans l’esprit haïtien, est synonyme d’opposition au gouvernement. D’où les ennuis qu’ils ont connus. Mais la réalité est qu’ils manifestaient une opposition au milieu haïtien lui-même qui devenait de plus en plus sclérosant. Des artistes comme Max Pinchinat et Villard Denis (1940-2004), alias Davertige, disaient la frustration d’être pris à l’intérieur des structures arbitraires mises en place dans le monde de l’art haïtien. Ces réflexions justifient, d’une certaine manière, le choix de l’exil : par besoin de respirer. Sans qu’on ne puisse parler véritablement de censure, il faut reconnaître qu’exils et dépressions ont été le prix à payer pour l’entrée de l’art haïtien dans la modernité.
Max Pinchinat 1925-1985
Cocotiers
Huile sur toile
50,8 X61cm (20″ X 24″)
Coll. Particulière
Pour respirer aussi, plusieurs haïtiens sensibilisés par l’universalisation de l’art se sont lancés dans l’expérience de grands centres comme Paris ou New York pour ne citer que les plus importants. Une expérience qui a été difficile pour la plupart d’entre eux. Le développement des arts dans de tels milieux tenant compte d’apports divers venus du monde entier a fait que le seul domaine dans lequel les artistes haïtiens pourraient éventuellement partir gagnants dans la compétition était l’exotisme, une option qu’il ont refusée. Mais ce fut une expérience qui, au bout du compte, a été pleine d’enseignements qui ont fait avancer dans la modernité la carrière d’artistes comme Pétion Savain, Max Pinchinat, Antonio Joseph, Luce Turnier, Roland Dorcely, Villard Denis, Bernard Wah, Jacques Gabriel, Hervé Télémaque, Ronald Mevs, Rose Marie Desruisseau…
Quelques-uns des artistes dits primitifs étaient aussi de ceux partis pour fonder le Foyer des Arts Plastiques. Comment alors ont-ils vécu ce changement de milieu alors qu’on disait qu’il était difficile sinon impossible ? L’avancement technique des primitifs a alors fait l’objet de grands débats. Antonio Joseph (1921-2016) d’origine humble et résolument moderne dans sa peinture eut à exprimer l’opinion suivante : « On ne peut pas imposer des règles à l’artiste primitif, il est trop sensible. Son travail est acceptable et c’est tout ce que désire l’acheteur même le plus sophistiqué…. Avant de changer un primitif, il faut penser à ce qui peut arriver. S’il veut choisir d’autres voies, il peut le faire mais il ne faut pas le pousser. [38] Emmanuel Ledan, administrateur du Centre d’Art devait définir la position des dirigeants de cette institution : « L’un ou deux de nos primitifs ont déjà perdu leur innocence et ont commencé à apprendre quelques règles de manière à peindre plus réaliste, à mieux dessiner. Le résultat est malheureux. Ils ont instantanément perdu leur goût naturel, et à force de se concentrer sur l’amélioration de leur technique, ils sont devenus simplement de mauvais imitateurs d’un art médiocre. [39] Philippe Thoby Marcelin, dans ses notes, ne trouvait pas de résultats heureux à ce passage. Citant Exumé et Cédor, il trouvait qu’ils n’avaient pas gagné au change. Il les trouvait « pervertis à ce déniaisement et ils auraient mieux fait de ne pas franchir les limites de l’univers primitif qu’il peignait autrefois avec tant d’autorité, de fraîcheur et de poésie. [40] Mais, le Foyer, qui prenait l’allure d’une véritable école, a maintenu le cap. Avec la patience des uns, l’humilité des autres, la persévérance de tous, assez vite, on notait des progrès. C’est ainsi que Frantz Klein, Attaché cultuel adjoint à l’ambassade américaine a pu écrire : « René Exumé s’est probablement détaché du courant Primitivisme plus que tout autre peintre haïtien et il s’en détache encore. » [41] Alors qu’il décidait d’affronter le public, Dieudonné Cédor étonnait et, avec la bénédiction du célèbre auteur Jacques Stephen Alexis, il bénéficiait de la Une du Nouvelliste. Alexis le qualifiait de peintre du peuple, de grand visionnaire, d’artiste véritable, concerné par les luttes du peuple et de l’œuvre d’art [42]. Alors qu’Exumé est resté au Foyer qui ne s’imposera pas plus dans le milieu, c’est à Brochette que l’on va retrouver Cédor.
Dieudonné Cédor 1925 -2010
Marchande de mais moulu
Aquarelle sur papier
43,1 X 38,48 (17″ X 12″)
Fondation G & M Nader
A l’époque, il y avait le périodique Coumbite [43] auquel a souvent participé Michel Philippe Lerebours. C’est dans Coumbite qu’il reprenait cette vérité exprimée par le peintre Dieudonné Cédor. : « l’art ne peut pas vivre et s’imposer dans une société qui le méconnaît. L’appuyer sur le commerce c’est prononcé sa condamnation. Il faut la formation d’un public qui comprenne, discute et apprécie son art.» [44]
Il faut dire qu’entre temps, l’industrie touristique en Haïti s’était développée exponentiellement à la suite de l’Exposition Internationale célébrant le bicentenaire de la ville de Port-au-Prince. Les touristes, de plus en plus nombreux, ne s’intéressaient qu’aux primitifs. Mais, puisque le « miracle », comme on l’a appelé, ne pouvait pas se répéter à l’infini, la production d’œuvres dites naïves s’est essoufflée. A part quelques rares exemples : des primitifs revenus au Centre après avoir tenté l’expérience du Foyer, par exemple, et de nouvelles recrues qui affichaient moins de maladresse, la relève d’un Hyppolite, d’un Obin, n’a fait que répéter certains codes qui donnaient à leurs œuvres cette apparence qui séduisait les collectionneurs étrangers malavisés, ceux qui n’avaient pas compris que ces œuvres n’étaient ni rares, ni même uniques. Avec le temps, on a vu arriver dans les boutiques pour touristes et sur les trottoirs, des productions à bon marché, souvent fabriquées à la chaîne. Le cas du peintre qui se copiait lui-même ou qui encourageait la copie par ses disciples, copies qu’il signait, n’était pas rare non plus. Et puis il y a les faux. Ainsi peut-on décrire le cycle qui a vu naître et se perdre, une tendance artistique qu’une critique responsable aurait sûrement prouvé être d’un certain intérêt.
Rigaud Benoit : Nativité
Philomé Obin : Crucifixion
Castera Bazile : Ascension
Murales de l’abside de la
Cathédrale Épiscopale de
La Saine Trinité
Port-au-Prince
Le public haïtien, consommateur potentiel d’œuvres d’art, maintenait sa répulsion de ces œuvres jugées grossières et qui, de surcroît, était souvent porteuses d’images d’inspiration vodou. C’est ainsi que très rares sont ceux qui ont apprécié à leur juste valeur les grandes murales de la Cathédrale Épiscopale de la Ste Trinité [45] de Port-au-Prince, réalisées au début des années 1950. Ce fut le plus remarquable projet entrepris par les artistes dits primitif/naïfs. Si la presse en a parlé, une fois, ce n’était pas pour vanter les prouesses de ces artistes habitués à travailler sur des petits formats, encore moins pour dire les réticences provoquées au sein des fidèles de l’Église Épiscopale d’Haïti qui démontraient, encore une fois, cette aversion qui existait au sein de la communauté chrétienne, en général, face à l’emploi d’images saintes. Souvent utilisées pour représenter les divinités du panthéon vodou.
Jean Claude Garoute (alias Tiga) (1935-2006)
Masque
Aquarelle sur papier
68,6 X 50,8cm (27″ X 20″)
Coll. Particulière
Les artistes modernes du Foyer exposaient régulièrement, individuellement ou en groupe, question de garder le moral. Mais la critique était absente. Ainsi, de Lucien Price qui exposait ses dessins abstraits, c’est Max Pinchinat qui attirait l’attention sur le fait que « l’élément graphique est mis en relief par le rythme et les modulations des valeurs. » [46] Quant à Pinchinat dont les expositions attiraient toujours du monde, les commentaires ne parlaient que de « personnalité remarquable », de « travail sans hésitation ». On a une fois parlé « d’audace » et Morisseau-Leroy a dit qu’il était un « révolutionnaire » [47].
Vers le milieu des années 1950, parmi des membres du Foyer naissait l’idée d’un petit village d’artistes. Si Brochette n’est pas devenu ce village, il demeure que cette résidence, très modeste qui a abrité ce regroupement de créateurs, a été pendant un moment le centre de l’activité artistique de Port-au-Prince. On a pu voir des intellectuels, penseurs, poètes et écrivains fréquenter les artistes sans pour autant leur apporter, comme il le faudrait, des écrits de support. Ils discutaient ensemble et c’était déjà un grand progrès. C’est à cette époque qu’est né le mécénat. C’est alors que les Haïtiens ont commencé à consommer l’art de leur pays et leur préférence allait aux modernes. Mais, l’entrée de la modernité dans l’art haïtien a malheureusement jeté bien des créateurs dans la confusion.
Sans comprendre leurs hésitations, le public les a encouragés afin de mettre fin à l’art primitif/naïf, un art qu’il méprisait tant. Dire que l’on n’aime pas cet art, qu’on lui préfère celui des modernes, c’était là une opinion arbitraire, subjective. Il aurait été préférable pour ce public de pouvoir baser son jugement sur des données objectives. Mais qui pouvait alors leur fournir ces données. Pas le Centre d’art que l’on voyait comme la source du mal. Alors, dans le public, on a vu se développer un certain snobisme qui a fait que, par manque de formation, certains s’extasiaient devant les pires audaces : celles de peintres qui, pour faire moderne et obéir à des modes, ont adopté des éléments contemporains qu’ils agençaient selon des règles ou des théories esthétiques qu’ils n’avaient pas tout à fait assimilées. La pire conséquence de cet état de choses est que ces artistes confus n’ont pas compris que la réussite d’une carrière pouvait hélas être un échec artistique.
Charles Obas (1927-1969)
Rara
Huile sur planche synthétique
33 X 40,6cm (13″X 16″)
Coll. Particulière
Un art moderne Haïtien était donc à définir. « L’élément fondamental de notre modernité, se demandait Maud G. Robard, ne serait-il pas l’aliénation, un souci de plagiat ?» [48] Jean Claude Garoute, alias Tiga (1935-2006) qui partageait déjà la même inquiétude pensait à la création de la « Nouvelle École », avec un nouveau vocabulaire pictural essentiellement fait de formes simples, de stylisations semblables à celles que l’on peut trouver dans la poterie du Caribéen Ancien ou encore dans les signes rituels du vodou. Pour lui, les formes et images de ce vocabulaire « éveillaient tout de suite et toujours, chez celui qui les observe, des réactions positives, instinctives, incontrôlées. » [49] C’est ce projet qu’il mettra en application en créant le Centre Culturel Poto-Mitan, à Port-au-Prince, l’année d’après, en 1968.
Jean René Jérôme (1942-1991)
Célébration du corps
Acrylique sur massonite
91,4 X 91,4 (36″ x 36″)
Succession Mireille P. Jérôme
Dans l’intérêt que développait le public haïtien pour son art « moderne » il est rarement allé au-delà du premier degré dans son observation d’une œuvre. Il n’a pas su voir que derrière des visages muets, quelques fois dépourvus de traits ou dissimulés sous des masques, derrière des scènes de genre sombre, il y avait un sentiment d’angoisse, de dénonciation. De même, il n’a pas compris que des images fortes de la crucifixion n’étaient pas accusatrices, mettant en cause la religion, mais un art révélateur d’un grand malaise induit par des crises politiques. Il ne savait sans doute pas que dans les sociétés répressives, en général, on voit les arts contraints de ne pas se mêler de politique. Et, s’il est vrai que la manière directe n’est pas employée parce que trop périlleuse, la communication entre les créateurs et le public demeure et apparaît comme un moyen de « dire ». Elle est alors d’autant plus précieuse qu’elle est quelquefois la seule.
A titre d’exemple, c‘est dans l’interprétation des œuvres d’un petit groupe d’artistes qu’une certaine critique a fait resurgir le terme “Beauté”. Éliminant l’approche difficile des œuvres des peintres embarqués dans le “moderne”, et le désarroi de celles que l’on a dit être d’un « réalisme de cruauté », ces peintres ont été perçus comme pratiquant le culte du “beau”; d’où le label qu’on leur a collé et qui perdure: Ecole de la Beauté. On peut se demander ce qui a fait l’énorme succès qu’ils ont connu dans le milieu, et pourquoi tant de jeunes les ont suivis dans ce qu’ils croyaient être un mouvement.
Paul Claude Gardère (1944- 2011)
Trône et Royaume
Huile sur planchet synthétique
83,82 X 76,20cm (33″x 30″)
Figge Museum, Davenport, Iowa
Liés à l’Académie des Beaux-Arts fondée en 1959, on a cru que venant d’artistes professionnels, avec une solide formation, leurs œuvres devaient être forcément belles. Elles l’étaient et le sont encore à cause des belles formes, des lignes élégantes et des couleurs harmonieuses à souhait qui les composent. Cependant la beauté dans leur art n’est pas une fin. S’inspirant peut-être de Mallarmé, ces artistes ont peint non pas un sujet mais l’effet que celui-ci pouvait produire. Ils ont voulu donner une nouvelle vocation à l’art en invitant le public à une expérience esthétique nouvelle où apparait quelquefois une « subversion de la beauté… et un désir de protestation. » [50]
Avec la solide formation qu’elle proposait, l’Académie a été vue comme une institution érigée contre la maladresse des primitifs/naïfs. Ce qu’elle n’a surtout pas fait, c’est enfermer ses étudiants. Leur rappelant que l’art était issu de l’art, l’Académie les a libérés de la peur de l’aliénation qu’avait tellement entretenue les Indigénistes. Ces étudiants se sont alors sentis libres de voir et ou fréquenter d’autres artistes ou d’autres regroupements d’artistes sachant que la relation de leurs œuvres à de telles créations antérieures où même contemporaines, internationales ou locales, n’est qu’une opportunité par laquelle ils se fortifient.
Denis Smith (1954 – )
Crucifixion
Acrylique sur toile
76,7 X 60cm (30″ X23″ ½ )
Coll Nicole Lumarque
Dans les années 1970, nombreux étaient les artistes qui s’exprimaient dans des styles les plus divers allant de l’abstraction à des images inspirées du vodou, en passant par des images oniriques. A cela se sont ajoutés des jeunes haïtiens qui ont grandi loin du pays avec leurs parents en exil et qui y ont entrepris des études dans des écoles d’art. Désireux de participer à ce qu’on a dit être un nouvel âge d’or, ils sont revenus au pays. Dans ce que certains ont dit être une volonté de s’inscrire dans l’histoire de l’art haïtien, ils ont voulu faire leurs débuts au Centre d’Art, là où, on a dit que tout avait commencé.
Pascale Monnin (1974 -)
Ma chair et les Colibris
Matériaux divers
2m50 d’envergure, environs 8 pieds
Coll particulière
Et puis est venu Saint Soleil, plein de promesses. C’était au départ une expérience menée par Jean-Claude Garoute, alias Tiga qui en a présenté les résultats à André Malraux, de passage en Haïti. Il s’est enthousiasmé. Le mouvement Saint Soleil a été tout de suite récupéré par l’étranger en mal de peintures naïves. En réalité, il aurait mieux valu considérer la peinture de Saint Soleil comme de l’art brut tel que l’a défini Dubuffet c’est à dire une production présentant un caractère fortement inventif, aussi peu que possible débitrice de l’art coutumier et des clichés culturels, et ayant pour auteurs des personnes étrangères aux milieux artistiques professionnels. On connaît la suite.
Au cours des trente dernières décennies, on a vu apparaître les techniques mixtes et une utilisation de matériaux inhabituels comme le béton, des objets qui ont déjà servi ou qui sont tout simplement insolites. Suivra plus tard l’utilisation de nouvelles technologies comme le numérique. Il est alors devenu de plus en plus difficile de distinguer ce que traditionnellement on considère comme les beaux-arts, les arts décoratifs et les arts mineurs (artisanat).
Celeur Jean Hérard (1966 – )
Sans Titre
Bois et matériaux de récupération
81.3 X 43.2 X 17,78cm (32″ X 17″X 7″) |
Coll. Georges Nader fils
Alors que le public haïtien commençait à peine à accepter l’art abstrait, le voilà confronté à cette série de nouveautés qui lui arrivent sous le label : « art contemporain », terme dont l’utilisation ne porte aucun sens précis autre que « actuel ». Encore que beaucoup de ce qui est proposé comme « actuel » remonte souvent à des décennies. « Art contemporain » c’est en fait une expression parapluie sous laquelle se regroupent l’interdisciplinaire, mais aussi un refus de toute discipline. D’où la difficulté pour la critique, et le public forcément, de s’y adapter et d’en comprendre le sens. Aussi, le résultat qui est palpable est que le spectateur se sent devenir incompétent. La phrase : « Ce n’est pas pour moi » vient alors manifester un refus d’aller plus loin dans les efforts pour essayer de comprendre pourquoi on peut considérer ces expressions nouvelles comme de l’art et ceux qui les proposent comme des artistes.
La critique pouvait pourtant noter un rapprochement entre la culture des élites et la culture populaire. Ceci était évident, par exemple, dans la création en 1978 d’un groupe musical comme Boukman Eksperians qui est venu proposer ce qui a pris le nom de « musique racine », un mélange d’influences nord-américaine et de rythmes enracinés dans la culture populaire haïtienne. Cette musique a connu un tel succès, parmi les jeunes et des moins jeunes, qu’elle a ouvert la voie à d’autres formations musicales similaires. On constate alors que dans le domaine de la musique, la diversité de formes d’expression ébranlait la hiérarchie des genres. Graduellement, cette idée s’est étendue à d’autres disciplines. Ainsi, lentement au début, et de manière plus affirmée avec le temps, s’est installée une culture vivante très liée au quotidien, au social, même au politique. Cette approche nouvelle allait alors amener un public nouveau dans le contexte d’une démocratisation culturelle avec comme effet que les demandes de ce public ne tiendront pas nécessairement aux critères d’excellence, ouvrant hélas la voie à des non-artistes.
Ceux qui, de la jeune génération, avaient le talent et les dispositions nécessaires, ont eux entamé un réel dépassement des frontières, remettant en question ce que devrait être une œuvre d’art. Ce qui a suivi alors – et on en verra d’autres – a été d’une diversité époustouflante.
Lucien Price (1915-1963)
Étude
Fusain sur papier
25,4 X 35,6cm (10″ X 14″ ½ )
Coll. Particulière
Avec tout cela, le public Haïtien, sans aucun soutien a été et est encore sans cesse sollicité. Avec la volonté de guider ce public dans ses choix, mais surtout pour aider les artistes, les galeries d’art se sont installées dans le milieu. La galerie d’art, critiquée surtout par les artistes eux-mêmes, s’est pourtant révélée être un agent important dans l’extension de la clientèle locale avec les effets positifs qu’on suppose sur le moral des artistes.
Le prix auquel leurs œuvres se vendent confirme en effet la reconnaissance du marché et aussi et surtout la place qu’ils occupent dans ce marché. Cette notion est également d’importance pour l’acheteur, particulièrement celui pour qui l’art est un investissement. Mais en dehors de la relation artiste-acheteur, le prix des œuvres intéresse beaucoup ceux qui, contrairement à ce qu’a dit Warhol, pensent à la commercialisation avant la création. Pour beaucoup d’entre eux, une telle donnée est déterminante dans l’évolution de leur travail. Michèle Montas, journaliste revenue au pays dans les années 1970, prenant connaissance de la situation de l’art, notait « l’existence d’une certaine peinture en série, paresseuse et rentable. » [51] L’affaire prenait des proportions lorsqu’intervint, en Octobre 1981, l’exposition-concours Connaître les Jeunes Peintres, créée pour offrir aux jeunes une chance de s’élever au-dessus des préoccupations mercantiles. Ces jeunes pouvaient ainsi donner le meilleur d’eux- mêmes et avaient, par ce biais, l’opportunité de se faire connaître d’un public haïtien trop souvent indifférent et tourné vers les « gloires » établies. Hélas, des années plus tard, Louis Dubois, président du Conseil d’Administration du Musée d’Art Haïtien, constatait qu’il s’était créé une sorte de cassure qui fait que « ce sont plus des imitations qu’on trouve. Fort souvent, des imitations des artistes qui ont obtenu une certaine renommée. » [52]
Il faut dire que récemment, avec la venue des plus récents mouvements et avec les changements dans le climat politique, le succès commercial est de moins en moins garanti en Haïti. C’est ce qu’ont constaté par exemple les artistes du groupe Atis Rezistans qui se sont trouvés dans le mainstream sans vraiment l’avoir vraiment sollicité. Le public haïtien est resté indifférent et la critique, généralement, n’en a fait qu’un constat. Ces œuvres essentiellement réalisées à partir de rebuts ont été saluées dans tout le monde occidental, ont été exposées dans les musées, dans de grandes expositions. Ces artistes espéraient, par-dessus tout, voir un changement dans leurs conditions de vie. Aussi, cette ouverture vers l’extérieur leur semblait être un moyen d’atteindre ce marché étranger qui avait soutenu diverses communautés d’artistes en Haïti [53]. Mais, l‘enthousiasme des structures artistiques étrangères, des collectionneurs, pour de multiples raisons ne s’est pas traduit en acquisitions. Mais, malgré tout, Celeur Jean Hérard a montré sa résilience : « Bien que je ne puisse pas vivre de mon art, je me sens heureux. Mon œuvre est admirée et à cause de cela, je supporte toutes les privations.» [54]
Gérald Alexis
[1] L’indigénisme est un mouvement littéraire qui s’est étendu aux arts plastiques après la rencontre, en 1931, entre le peintre américain William Scott, bénéficiaire d’une bourse pour peintre Haiti et son peuple, et un artiste débutant Pétion Savain (1906-1975). Georges Remponeau (1916- 2012) et d’autres peintres, plus ou moins, d’une même génération, se sont joints au mouvement. Ils étaient du même milieu social, de ce que l’on appelle en Haïti la « bourgeoisie ». Ils avaient tous et toutes une certaine formation reçue dans des établissements scolaires, dans le milieu familial ou par des cours privés ou par correspondance. Ils avaient des tempéraments différents et surtout vivaient des circonstances différentes, ce qui explique, en grande partie, le fait que leur carrière se soit développée différemment. Le mouvement s’est vite répandu dans les villes de province et a rejoint des artistes de conditions sociales plus modestes.
[2] productions artistiques qui, pour la plupart, étaient des produits de l’enseignement de l’art au niveau des écoles secondaires, principalement congréganistes, avec comme enseignants des étrangers
[3] Scott était un peintre afro-américain bénéficiaire d’une bourse pour venir peindre en Haïti
[4] Le Nouvelliste, Port-au-Prince, Haïti, 23 février 1932
[5] Da Silva, Marcello dans Les Griots, Port-au-Prince, Haïti, no1, vol 1 juillet, aout, septembre 1938, p 75.
[6] Anonyme, Le talent de Pétion Savain : Opinion de deux artistes américains, Le Nouvelliste, Port-au-Prince 15 avril 1932.
[7] Ce tableau est aujourd’hui dans la collection du Art Museum of he Americas (AMA, de Washington DC.
[8] Rosemond, Henri Ch. L’Ouverture de l’Exposition de New York, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, le 10 mai 1939, pp1,4.
[9] Il est l’auteur du roman La case de Damballah, Imprimerie de l’État, Port-au-Prince,1939
[10] Max Martinez, L’exposition de Peintures au Centre d’art, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, le 25 mai 1944, p. 2
[11] Amenée par le cubain José Gomez Sicré. Cette exposition était antérieurement présentée au Musée d’Art Moderne de New York
[12] Gomez Sicré, José dans Avant-Propos, The Art of Haiti de Eleanor ingalls christensen, A.S. Barnes & co, South Brunswick and New York, 1972, p.10.
[13] AMBROISE Hector. « Culture, Art et Folklore », Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 23 Juin 1948.
[14] Lucien Price, Les expositions du mois : l’Exposition Bottex, Studio 3, Le Centre d’Art, Port-au-Prince, No. 3, avril 1946.
[15] Malheureusement, Studio 3 n’a pas eu longue vie. Seulement trois numéros ont été produits.
[16] Michel Philippe Lerebours Haïti et ses peintres, de 1804 à 1980, l’imprimeur II, Port-au-Prince, 1989, p. 225
[17] Extrait d’un texte de Dewitt Peters, traduit par Louis Dubois, et publié par Gérald Alexis dans Il y a 40 ans, le Centre d’Art : L’Arrivée des primitifs, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, Haïti, le 14 mai 1984, pages 3,7.
[18] Dans son ouvrage « De la Plastical Cubana y Caribeňa (1990) » l’historienne de l’art, la cubaine Yolanda Wood, note que cette expérience est venue confirmer que la création intuitive permettait une plus grande spontanéité, une plus grande liberté d’expression, et pouvait ainsi aboutir à la création d’un art essentiellement cubain
[19] Cette entrevue a été publiée dans le catalogue de l’exposition Art of Haiti and Jamaica, Center for Inter-American relations, New York, 1968, p 72.
[20] Luis M. Castañeda (2014) Island Culture Wars: Selden Rodman and Hait, Art Journal, 73:3, 58-59
[21] Note de presse à l’occasion de l’exposition Naive Art of Haiti, The Carol Reese Museum, East Tennessee State University a Johnson city, 1967
[22] Selden Rodman était
[23] Selden Rodman cite par Paul Waggoner dans The Haitian Miracle, Contemporary Times, Chicago, May 1988, p.8
[24] Mark Stevens, Black Magic, Newsweek.18 septembre 1978, p. 68.
[25] Stevens, ibid
[26] Dans Art et Culture : En conversation avec l’artiste peintre Roland Dorcely. Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 17avril 1984, p.8
[27] Fraënel dans Centre d’art – Exposition du Père Parisot, Aya Bombé, No.7, Port-au-Prince, Haïti, avril1947, p.7
[28] Lucien Price, Exposition de Maurice Borno, Luce Turnier et Raoul Dupoux, Studio 3, No 5, Avril 1946.s’engager
[29] Rimbo, Je ne comprends pas, Maniguet, Port-au-Prince première année numéro 2 ,2 décembre 1944 p. 84
[30] Non signé, Une expo d’artistes haïtiens primitifs à Keys West, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 19 janvier, 1949, p.1
[31] Pinchinat, feuillet d’exposition au Centre d’art, Port-au-Prince, janvier 1949.
[32] Fondation du Foyer des Arts Plastiques, Le Nouvelliste, le 17 Aout 1950, p.1
[33] Mme Paul Magloire expose ses toiles, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 21 septembre 1950, p.1
[34] Michel-Philippe Lerebours, p. 11
[35] Chenet, Jean, Coup d’œil à travers la peinture haïtienne, Brochure de l’exposition du Foyer des Arts Plastiques, Port-au-Prince, 17 septembre 1950
[36] Lerebours, Michel-Philippe, vol II, p. p. 16.
[37] Rodman, Selden, The Insider, Louisiana University Press, 1960, p.63
[38] Antonio Joseph, cité par Julie Jensen dans Quad-Citians host famed Haitian Artists, photocopie d’un article sans référence sur le nom et la date de la publication.
[39] Transcription retrouvée dans les archives de Pierre Monosiet, assistant de Dewitt Peters, d’une entrevue accordée à New York par Emmanuel Ledan a Monsieur Russel, à l’occasion de l’exposition du peintre Hector Hippolyte à la American British Centre de New York en janvier 1948.
[40] Philippe Thoby Marcelin, Panorama de l’Art Haïtien, Imprimerie de l’État, Port-au-Prince,1956, p. 43.
[41] Robert Klein, Les Arts : René Exumé, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 27 septembre 1958, p.1.
[42] Jacques Stephen Alexis, Dieudonné Cédor, peintre du peuple, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 31 janvier 1958, p.1
[43] Coumbite est une application au milieu artistique haïtien de la traditionnelle réunion d’individus partageant une même structure d’intérêts et qui, dans une optique de gratuité, mettent à disposition de l’un des membres du groupe leur force de travail, leurs moyens de production, pour un temps limité.
[44] Dieudonné Cédor, repris par Michel Phillipe Lerebours dans Commerce, échafaudage et plaie de la peinture haïtienne, Coumbite, Port-au-Prince, vol 2, no. 215 décembre 1957.
[45] La phrase du Chef de l’Église Épiscopale d’Haïti, Mgr Alfred Voegeli : « Thank God they painted Haitian » (Dieu merci ils ont peint haïtien) qui n’a été publiée dans la presse américaine, indique par ailleurs que, dans le fond, ce projet, même au risque de déplaire aux fidèles, voulait donner la parole aux primitifs/naïfs, vus comme les seuls à faire un art authentiquement haïtien.
[46] Max Pinchinat, présentation de l‘exposition Pinchinat, Price, Noble, Palais des Beaux-arts, cité de l’Exposition, 5 mars 1951.
[47] Felix Morisseau Leroy, Max Pinchinat, Le Matin, Port-au-Prince, 20 janvier 1955.
[48] Robart, Maud Guerdes., Un ange passe sur une exposition, Le Nouveau Monde, Port-au-Prince, 25 mai 1973
[49] GAROUTE Jean Claude – “Pour un art moderne haïtien”, Bulletin Artistique, Port-au-Prince, 26 mars 1967
[50] Romain, Pascale – Quand Bernard Séjourné et Jean René Jérôme subvertissent la beauté in Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 20 juin 2008.
[51] Montas, Michèle, Art contemporain Haïtien in Le Nouvelliste, Port-au-Prince, le 28 mai 1973
[52] Dubois Louis, Vers la réouverture du Musée d’Art Haïtien du Collège Saint-Pierre? in Le Nouvelliste, 26 janvier 2015
[53] Je fais ici référence au mouvement primitif/naïf des années 1940/50 et à l’expérience Saint Soleil des années 1970.
[54] IÑURREITA RODRIGUEZ, Lena, La Grand rue de los artistas haitianos, Anales del Caribe, Casa de las Americas, La Havane, 2007, p. 183, p. 182
Gérald Alexis est historien de l’art, né en Haïti qui vit actuellement au Québec, Canada. il a été directeur du Musée National d’Haïti (MUPANAH) et du Musée d’Art Haïtien du Collège Saint-Pierre. Il est membre du Conseil international des musées (ICOM). Titulaire d’une maîtrise en art latino-américain et caribéen de l’Université du Texas à Austin, il a été commissaire de plusieurs expositions nationales et internationales, et a donné des conférences dans de nombreux organismes culturels et universités d’Europe, des Caraïbes, d’Amérique du Nord, Centrale et du Sud. Auteur de Peintres haïtiens et Artistes haïtiens (Edit. Cercle d’Art, Paris), auteur de plusieurs monographies d’artistes haïtiens, il a aussi publié de nombreux essais et critiques dans divers catalogues d’expositions, magazines, journaux et sites internet. Il est membre de l’Association internationale des critiques d’art (section Caraïbes) et de l’Institut Canadien de Québec.
Reflections on Art Criticism in Haiti
In an ideal world, each artistic movement would be mirrored by a concurrent wave of critical discourse. In Haiti, however, this has seldom been the case. Take, for instance, the indigenist movement in painting (1930–1940) [1] —Haiti’s first substantial artistic project, which was rooted more in literature than in the visual arts. Driven by writers aiming to assert a national identity, the movement set out to champion an indigenous ideal that stood in opposition to the looming threat of cultural alienation. Some local newspapers published sharply critical texts, dismissing these works as mere “pastiche” imitations [2], aimed only at a limited circle of family and friends.
William Scott (!884-1963)
Paysage de Kenskoff c1930
Huile sur panneau
27,9 X 34,9cm (11″ X13″3/4)
Coll. particulière
These critiques, however, could have shed light on the fact that imitation, as a learning tool, holds value within an educational framework. They might have drawn attention to the lack of cultural institutions and public spaces where artistic development could thrive. Above all, such critiques could have underscored how this infrastructural gap hindered the growth of the visual arts in Haiti.
Pétion Savain (1906–1973), one of the first artists to attempt a full-time career in the arts post-American occupation, took his initial art lessons at a congregational school. His artistic path shifted dramatically upon encountering the work of African-American artist William Scott [3], whose depictions of Haiti and its people resonated deeply with him. Inspired, and with only rudimentary training, Savain boldly dedicated himself to painting.
D’une demoiselle Riobé
Madone d’après la Verge à la Chaise de Raphaël
Crayon mine sur papier
35 X 28cm (14″ X 11″)
Coll. particulière
At the time, however, artists often faced prejudice, and the local press struggled to comprehend his decision, offering only tepid observations, such as, “This young artist devotes himself to painting, watercolor techniques, and engraving.” [4]
Savain was an active participant in the literary circles of his time. Despite his friendship with the renowned writer and poet Jacques Roumain (1907–1944), who shared art books with him, Roumain never wrote about Savain’s work. Similarly, the poet Léon Laleau (1892–1979), who occasionally purchased pieces from Savain, left no commentary on his paintings. This was not out of disregard; perhaps they felt his art spoke for itself. Such commentary was rare, though one remark observed, “Savain’s paintings exalt Haitian nature in its infinite variety. They are like pages in a great book of art, which present and future generations will continue to leaf through, learning the direction of national beauty.” [5] This praise was not only encouraging but underscored the potential for Savain’s work to embody the ideals of Indigenism, as Roumain had envisioned. His paintings, by celebrating the “Beau National,” held the power to instill pride in Haitians.
The local press, lacking confidence in its ability to critique art, instead published the views of African-American artists who visited Haiti in the early 1930s. Eleanor Bourdin remarked that Savain “expresses the modern movement toward a national art.” Painter Douglas Brown predicted his success in the United States, saying, “We like native things.” [6]
Pétion Savain (1906-1973)
Marché sur la colline
Huile sur toile
53,9 X 77, 47cm (22″ X 30″ ½)
Art Museum of he Americas, Washington DC
Indeed, Savain’s painting Marché sur la colline [Market on the Hill] [7] won a prize in 1939 at the IBM international competition and was featured at the New York World’s Fair that same year. This significant international recognition, a first for a Haitian artist, went largely unacknowledged at home. Though displayed at the Cercle Port-au-Princien on September 19th, the painting drew an impressive audience who found it original and wondered if it would stand out among works from other countries. They awaited reports from the fair’s opening on April 30th, 1939, for validation. However, a substantial report by Le Nouvelliste on May 10th mentioned only the composition of the Haitian delegation, omitting any mention of Savain’s painting [8]. This gap highlighted a reality: the press lacked critics knowledgeable in art, leaving those assigned to cover exhibitions capable only of producing society columns.
Philippe Thoby-Marcelin (1904–1975)—poet, novelist, journalist, and politician—had the requisite skills to take on the role of art critic. He documented the Haitian art scene, later publishing his observations in Panorama de l’Art Haïtien, the first book on Haitian art authored by a Haitian. Thoby-Marcelin knew Savain well and often used comparisons to convey his insights on Savain’s work. He did not hesitate, for instance, to liken the freshness and early technical missteps in Savain’s work to that of Henri Rousseau. As Savain’s style matured, Thoby-Marcelin categorized him as “premodern” and aligned his evolving approach with certain European painters, situating Savain within the historical context that led to modern art. He saw Savain’s work as a Creole fusion of the styles of Vlaminck, Lhote, and Dunoyer de Segonzac. Some may view Thoby-Marcelin’s attempt to connect Savain’s romanticism with the more intense work of Vlaminck as a bit excessive. In his estimation, Savain’s temperament perhaps most closely resembled André Lhote’s—a thinker and artist in search of a new visual language that honored tradition. However, lacking Lhote’s extensive artistic background, Savain did not develop theoretical perspectives on painting. Although a writer [9], he neither recorded nor published reflections on his vision for a “national” art. Notably, Thoby-Marcelin’s comparisons, while insightful, led later lay critics to adopt a habit of likening local artists to globally recognized figures, giving rise to exaggerated opinions like, “He’s the Haitian Picasso”—a fanciful notion at best.
It was Max Martinez who reviewed the exhibition at the inauguration of the Centre d’Art [Art Center] in Port-au-Prince on May 14, 1944. Martinez, while acknowledging Dewitt Peters, the founding director of the Center, and all those who supported the initiative, brought a valuable critical perspective to several key works he considered major. Space constraints in the newspaper limited his ability to discuss each artist in depth; nevertheless, he emphasized the significance of each one’s contribution to the exhibition’s success [10].
Antoine derenoncourt (1909 – 1951)
Rara
Huile sur toile
43,5 X 54cm (17″1/8 X 21″¼)
Coll. particulière
The artists of the Indigenist movement hoped the Centre d’Art would provide the structure they needed—an institution to cultivate public interest and foster a refined cultural taste. Initially, the director’s words seemed promising, as he spoke of his desire to develop the Haitian School, anticipated by the Indigenists. At that time, some artists at the Center remained devoted to “typical” themes, aiming for a photographic realism that could border on repetition. This tendency toward the “typical”, in comparison, risked stifling those artists who aspired to be “modern.”
Maurice Borno (1917-1955)
Paysage
Huile sur toile
50,8 X 61cm (20″ X 24″)
Coll. particulière
The Center’s 1945 exhibition of Cuban [11] avant-garde works catalyzed a self-reflective awareness among these artists, revealing both the challenges and limitations within Haitian painting. Perhaps this is why Cuban critic José Gomez Sicré perceived a sense of urgency in the artists’ search for ways to advance their craft. They sought a path to develop their style and, crucially, to establish a deliberate expression that could become the essence of their art.[12]
Although the challenge was difficult for everyone, artists from the two groups responded differently upon their arrival at the Centre des Peintres Populaires [Center of Popular Painters]. Hector Ambroise (1904–1962), one of the earliest Indigenist painters, felt confident enough to introduce the movement to his hometown of Jacmel, founding the Société des Trois Arts [Society of the Three Arts]. Yet, he expressed his disappointment with the Center’s approach: “At the time of the Centre d’Art’s founding, there was talk of promoting Haitian painting, yet what is being promoted as Haitian painting is of a rather specific genre, used merely for propaganda against our country’s art.” [13] Lucien Price (1914–1963), a more open-minded observer, appreciated the work of his colleagues in the popular art movement. Shortly before adopting abstraction himself, he commented on the watercolors of Jean Baptiste Bottex (1918–1979), a painter from northern Haiti:
Jean Baptiste Bottex (1918-1979)
Loin de la ville
Aquarelle sur papier
Disparu durant le tremblement e terre
Coll. Centre d’Art
“With a somewhat naïve touch, his drawings are very expressive. This character, enriched by wisely distributed, peaceful colors, lends Bottex’s work the frankness and delicacy of quality prints… Port-Margot counts among its sons one of the most popular painters.”[14] Eventually, modern artists like Price would incorporate elements from popular art, seeing it as a foundation for a distinctly Haitian aesthetic.
To further educate the public, the Center created Studio 3 in 1945 [15], a publication covering its activities, featuring comments from the Center’s artists on peer exhibitions, and offering opinions from prominent supporters of the Center. It even included theoretical texts like The Artist and the Community and On the Development of the Work, and benefited from contributions by foreign specialists. [16]
Philomé Obin (1891-1986)
Levée de l’occupation d’Haïti par les USA
Hhuile sur carton
43,18 X 60,9cm (17″X 24″)
Coll. particulière
On February 24th, prior to the Center’s inauguration, Philomé Obin (1891–1986) sent the Center’s leadership one of his paintings. A former bookkeeper from Cap-Haïtien, he pursued painting in his spare time. Peters later recorded in his diary, “It was my first experience with Haitian popular painting, and I didn’t yet know how to appreciate it.” [17] It was Gomez-Sicré, familiar with the Escuela Libre model established in his country in 1937 [18], who helped Peters recognize its value. Committed to making the Center accessible to all artists, Peters encouraged new recruits by providing them with materials to create “freely.” This approach earned him praise from American critics, who saw him as something of a miracle worker. In playing his new role as best he could, Peters stated in a 1952 Jamaican radio interview that, to his knowledge, “there was no art” in Haiti when he arrived [19]. With this remark, he dismissed the very movement he intended to nurture, overlooking the artists whose works—oil paintings, watercolors, and drawings—had been displayed in the Center’s inaugural exhibition. Clearly, the Center’s original mission had shifted.
The truth is, in Haiti, it was well understood that no miracle had occurred, though no one openly acknowledged it. Even if it went unappreciated, everyone knew that the popular painting Peters “discovered” indeed existed and had done so for years. Left on its own, it might have evolved naturally, shaped by the techniques and mindsets within the social group that produced it and for whom it was, in principle, intended. What Peters did was accelerate the production of these works, which promoters could then offer to a foreign market eager for art that met different criteria than those of high art. Yet there was more: in the absence of Haitian art criticism, a clever campaign called the “Renaissance in Haiti” was introduced by foreigners, with effects still felt today. Edward Sullivan, professor and researcher at New York University, acknowledges that the promotion of so-called primitive Haitian art helped create one of the most pervasive stereotypes in Caribbean art studies. This concept’s enduring visibility has not only overshadowed Haitian art trajectories that preexisted the Art Center but has also influenced collecting and exhibition trends that favor “self-taught” art, precisely the type the Center championed. [20]
In Haiti, public discussion often centered on the “awkwardness” of this popular art and on the control exerted by American critics over this “discovery,” which promoted the notion that Haiti was “the only country whose artistic production is entirely represented by the works of naive, primitive artists, not only because of their traditional approach but also their total lack of academic training.” [21] American critic Selden Rodman, who established himself at the Art Center, was seen as the mastermind behind this campaign to promote primitive Haitian paintings. Chicago columnist and gallery owner Paul Waggoner, writing in 1988, cited Rodman’s view that in “the creations of these primitives from an underdeveloped culture, we find an emotion and rapture reminiscent of the Italian pre-Renaissance.” [22] Likewise, critic Marc Steven acknowledged that Haiti’s art scene extended beyond the primitive but noted that “artists who ignored Western conventions were the most compelling,” [23] adding, “The more they paint like us, the less they can be themselves.” [24] It’s clear why Haitian modern artists who emigrated in the late 1950s found it challenging to gain acceptance abroad.
Hector Hyppolite (1894-1948)
Congo Queen
Peinture domestique, huile et crayon
(50.9 x 70.1 cm (20 x 27 5/8″)
Museum of Modern Art, N.Y.
The Art Center attracted prominent figures from around the world. Roland Dorcély (1930–2017), then a teenager, recalled these visitors as “people from another planet. We couldn’t decipher their language,” [25] he said. Leveraging his U.S. connections, Peters invited American artists to give lessons or master classes for the “modern” artists, offering these “teachers” the chance to exhibit in the Center’s galleries in place of payment. Of all the foreign visitors, André Breton, the father of French surrealism, was by far the most renowned. Among the works he saw, it was Hector Hyppolite’s paintings that captivated him, and with Breton’s enthusiastic endorsement, Hyppolite was thrust into the spotlight. Seeing a publicity opportunity, Peters and American critics quickly promoted Hyppolite as the leader of the so-called primitive movement. When Hyppolite participated in the summer 1946 exhibition at the Center, he won two awards: first place in the popular category and another prize for all the works in competition. Studio 3, which reported on this, didn’t mention the criteria on which these judgments were based. Haitian intellectuals took pride in the idea that this enigmatic popular painter could, as Breton suggested, contribute to the French surrealist movement. Hyppolite’s untimely death prompted a series of articles in the local press, though they focused less on the artistic qualities of his work—its symbolism, aesthetic choices, and visual language—and more on the man himself, his connection to the lwa of the Voodoo pantheon, and his vivid imagination. These narratives furnished all the elements necessary to enshrine Hector Hyppolite in legend.
In the latter half of the 1940s, the Art Center’s exhibition calendar was packed; however, only Exhibition No. 47 focused specifically on Popular Art. Most shows were individual or group exhibitions of artists who were heirs to the Indigenist or modernist movements, and few received written commentary.
Jean Parisot (1918-1999)
Sémaphore
Huile sur toile
61, X 30,5cm (24″ X 12″)
Fondation M. & G. Nader
Jean Parisot (1918–1999), who had taken art courses at the Saint Louis de Gonzague Institute, where his work was once displayed, was the first artist to whom Peters presented his vision for an art center. Having become a priest in the meantime, Parisot was honored in a 1947 solo exhibition featuring Le Sémaphore, an allegory symbolizing the end of the American occupation in Haiti. Critic Fraenel commented on this exhibition, noting that Parisot belonged “among those who, above all, seek to express their inner selves, celebrate their passions, recount their dreams—even their nightmares—the supreme goal of art.” [26]
In 1946, Studio 3 published commentary from Lucien Price, an artist himself, on the exhibition featuring works by Maurice Borno (1917–1955), Luce Turnier (1924–1995), and Raoul Dupoux (1906–1988). Of Borno, Price observed: “In his drawing, Borno amplifies, reduces, and deliberately abbreviates form and volume. This approach allows him to define and arrange planes that sometimes verge on the arbitrary, creating unexpected harmonies where contour, hue, and luminosity are beautifully emphasized.” Price concluded that Borno’s exhibition “reveals a vigorous talent as a painter.” Focusing on Turnier’s painting Coq de Combat, he noted a “decorative inclination revealed in a background that bears little relation to the foreground.” Nonetheless, he praised the show as “an exhibition that places its author among the foremost of our painters—an impressive achievement, considering that about two years ago, Luce Turnier knew nothing of painting or drawing.” As for Dupoux, Price highlighted his “strong preference and marked taste for landscape,” which “allowed visitors to appreciate his talent, his skill as a painter, and his versatility across media like oil and watercolor, through works that evoke the opulence and sunlit charm of the beautiful landscapes of Jérémie,” [27] Dupoux’s hometown in southern Haiti. In contrast, when Lucien Price, in his 1947 solo exhibition, presented pieces that pushed beyond traditional boundaries, Price’s only published reaction in a local review was simply, “I don’t understand.” [28]
In January 1949, while the local press highlighted the outstanding success of Haitian primitive artists in the United States, showcased in exhibitions organized with the support of the Department of Tourism [29], Max Pinchinat presented his work at the Art Center on the 20th of the same month. Expecting minimal attention from the press, he took matters into his own hands by distributing a text to visitors, in which he introduced himself and his work. In it, he reflected: “From my beginnings, it seemed to me that academic teaching did not align with the Haitian temperament… I did not yet foresee the interest in Haitian primitives, but I had the intuition that through the main currents of modern painting, I would find an art drawn from the magnetism of Negro art, consistent with my temperament.” [30] The lack of critical discourse, combined with the public’s indifference toward his exhibition, drove him to initiate, later in 1949, collaborations with key publications, including the daily Le Nouvelliste, the weekly Notre Temps [Our time], and the magazines Optique et Conjonction [Optique and Conjunction], the latter published by the French Institute of Haiti.
As early as 1947, Maurice Borno, the administrator of the Art Center, raised concerns about the institution’s impact and sustainability. In a report, he noted, “An institution like the Center cannot gain international recognition without more positive feedback from the country. The admiration aroused outside, however, has not been able to generate greater interest in Haiti, as reflected in the public’s attendance at the galleries.” This observation led him to question, “Has the Art Center gone bankrupt in its influence in Haiti?”
The answer became evident in 1950, a pivotal year that marked the Art Center’s decline and the founding of a new organization, the Foyer des Arts Plastiques. In August of that year, the daily Le Nouvelliste published a series of notes attempting to address the tensions surrounding the Art Center. Among these were statements from the Association of Haitian Artists (AAH), which included artists who would go on to establish the Foyer des Arts Plastiques. On August 11th, the new institution was officially inaugurated, with Le Nouvelliste publishing a brief announcement a few days later: “The members of the Association of Haitian Artists declared that they had broken up with the Art Center and founded, in Port-au-Prince, an artistic association under the name: Foyer des Arts Plastiques.” As agreed, on August 18th, Le Nouvelliste was printing the full founding acts of the Foyer on its last page, revealing that the steering committee consisted of Max Pinchinat, Lucien Price, and Jean Chenet.
The Foyer des Arts Plastiques launched its first major exhibition on September 17, 1950, at the Pavillon des Beaux-Arts in the Bicentennial City, marking a significant moment for the emerging group. According to Le Nouvelliste on September 21st, the exhibition presented an overview of contemporary Haitian painting, showcasing its diverse styles and attracting an impressive turnout of intellectuals, writers, and art enthusiasts. Interestingly, the event included works by Yole Magloire, wife of Colonel Paul Magloire, a presidential candidate, which garnered considerable attention. [32]
The exhibition was also an occasion for the Foyer to outline its guiding philosophy, elements of which were later highlighted by Michel-Philippe Lerebours in Haiti et ses Peintres de 1804 à 1980 [33]. The manifesto emphasized that “the future of the Haitian artist must in no way be subject to hasty crystallization imposed by the desire to satisfy current trends at all costs.” It argued for openness to global influences while asserting that « while folklore is a rich source of inspiration, it should not be the only one. » Jean Chenet, one of the Foyer’s leaders, articulated that “art cannot, must not be static… the criteria of artistic values of the country must be created anew. At the Foyer, the unfortunate distinction between “primitives” and “moderns” shall be abandoned, and art education and information on both contemporary and historical art movements would be made accessible to all.” [34] All artists would then have the freedom to choose what resonated most with them.
The decision made by the members of the Association of Haitian Artists to leave the Art Center was not a trivial gesture. It should have sparked debates, which could have been published in the local press, for the sake of historical record. By taking this step, these artists risked marginalizing themselves. In theory, such an action can yield positive effects by placing the group within a dynamic and evolving environment. Isn’t this the way all the “isms” that have shaped art history have emerged? However, with hindsight, we observe that such actions almost always sparked scandal before earning recognition.
Lucien Price 1915-1963
L’Homme au Balai
Fusain sur papier
22 X 28cm (8½ » X11″)
Coll. Particulière
The creation of the Foyer initially altered the relationship between these artists and their contemporaries, but more importantly, their connection with society. Critics might have noted that socially engaged art already existed in Haiti, in the then-little-known works of artists like Lucien Price and Andrée Malbranche. The content these artists explored was similar, yet the Foyer artists reinterpreted it in a new form. Among the public, there was a shift from indifference to displeasure.
This displeasure, even escalating to systematic rejection, reflects the emotional reaction of a public newly invested in artistic creation and eager to pass judgment. It was no longer a matter of dismissing the perceived clumsiness of the “primitive” or “naive” but rather responding to the formal choices the Foyer artists had made. Furthermore, in seeking to provide each artist with the means for full expression, the Foyer aimed to foster artistic subjectivity. This was a noble goal, though it was often misunderstood—or overshadowed—by political considerations.
Michel Philippe Lerebours’ use of the term “realism of cruelty” [35] to describe the painting of the Foyer des Arts Plastiques reflects this rejection of conservative Haitian society. Selden Rodman, deeply involved with the Art Center, sharply criticized these paintings, equating any radical stance in art with political extremism. The Foyer artists, whose works were deemed devoid of aesthetic value, were thus perceived as political activists—a label that, in the Haitian context, was virtually synonymous with opposition to the government. This perception accounts for the difficulties they encountered. In reality, however, they expressed opposition not to the government per se but to a stifling cultural environment. Artists like Max Pinchinat and Villard Denis (1940–2004), also known as Davertige, voiced frustration at being trapped within the arbitrary structures imposed on the Haitian art world. This situation justifies, to some extent, the choice of exile as a way to seek creative freedom. Although we may not speak of outright censorship, it is undeniable that the costs of modernization in Haitian art included episodes of exile and even depression.
Max Pinchinat 1925-1985
Cocotiers
Huile sur toile
50,8 X61cm (20″ X 24″)
Coll. Particulière
To find creative “breathing room,” many Haitian artists sensitized by the global expansion of art sought experiences in major centers like Paris and New York. This move was challenging for most of them, as the artistic development in these cosmopolitan hubs incorporated influences from all over the world. Consequently, the only niche Haitian artists could potentially capitalize on was exoticism—an option they largely rejected. Nevertheless, the experience proved invaluable, enriching the careers of artists like Pétion Savain, Max Pinchinat, Antonio Joseph, Luce Turnier, Roland Dorcely, Villard Denis, Bernard Wah, Jacques Gabriel, Hervé Télémaque, Ronald Mevs, and Rose Marie Desruisseau, advancing their paths toward modernity.
Actually, some of the so-called “primitive” artists were among those who had left to establish the Foyer des Arts Plastiques. How did they adapt to this change of environment, which was said to be challenging, if not impossible? The technical advancement of primitive artists became a topic of intense debate. Antonio Joseph (1921–2016), an artist of humble origins and a resolutely modern painter, voiced this perspective: “We cannot impose rules on the primitive artist; he is too sensitive. His work is valid as it is, and it is all that matters to even the most sophisticated buyer… Before changing a primitive, you need to think about what could happen. If he wants to choose other paths, he can, but we must not push him.” [37] Emmanuel Ledan, the administrator of the Centre des Arts, articulated the institution’s stance on this: “One or two of our primitives have already lost their innocence and have begun to learn a few rules to paint more realistically and draw better. The result is unfortunate. They instantly lost their natural taste, and by focusing on technique, they became poor imitators of mediocre art.” [38] In his notes, Philippe Thoby-Marcelin also questioned the results of this transition. Citing as examples Exumé and Cédor, he suggested that they had not benefited from the change, as he found their work “perverted, lacking the freshness, poetry, and authority characteristic of their earlier, primitive styles.” [39] Yet the Foyer, resembling a true art school, held steady in its mission. With the patience of some, the humility of others, and the perseverance of all, progress was soon evident. Frantz Klein, Cultural Attaché at the American Embassy, observed: “René Exumé is probably more detached from the primitivism movement than any other Haitian painter, and he continues to distance himself from it.” [40] When Dieudonné Cédor presented his work to the public, he amazed audiences, and with the endorsement of the renowned author Jacques Stephen Alexis, he was featured on the front page of Le Nouvelliste. Alexis celebrated Cédor as a “painter of the people, a great visionary, a true artist concerned with the struggles of the people and the essence of art.” [41] While Exumé remained with the Foyer, which never regained its earlier influence, Cédor found his place within the newly formed artistic community of Brochette, one of Port-au-Prince’s neighborhoods.
Dieudonné Cédor 1925 -2010
Marchande de mais moulu
Aquarelle sur papier
43,1 X 38,48 (17″ X 12″)
Fondation G & M Nader
At that time, there was a periodical named Coumbite [42], in which Michel Philippe Lerebours was a frequent contributor. It was in Coumbite that he reiterated the truth expressed by the painter Dieudonné Cédor: “Art cannot survive and thrive in a society that ignores it. Relying on commerce alone is to condemn it. We need to cultivate an audience that understands, discusses, and appreciates art.” [43]
Meanwhile, Haiti’s tourism industry had expanded rapidly following the International Exhibition celebrating the bicentennial of Port-au-Prince. Tourists, arriving in ever-increasing numbers, showed interest exclusively in primitive art. But as the so-called “miracle” couldn’t be endlessly replicated, the production of naïve works gradually lost vitality. Apart from a few exceptions—such as some primitives who returned to the Art Center after experimenting with the Foyer and newer recruits with slightly more refined styles—the successors to artists like Hyppolite and Obin merely repeated familiar codes, crafting works that appealed mainly to foreign collectors who misunderstood them as unique rarities. Over time, cheaply produced paintings, often mass-produced, began appearing in tourist shops and on sidewalks. Cases of painters reproducing their own works or encouraging students to create copies that they signed, were common. This commercialization even led to the proliferation of fakes. This cycle illustrates the rise and decline of an artistic trend that, had it been guided by responsible criticism, might have proven to be of lasting interest.
Rigaud Benoit : Nativité
Philomé Obin : Crucifixion
Castera Bazile : Ascension
Murales de l’abside de la
Cathédrale Épiscopale de
La Saine Trinité
Port-au-Prince
The Haitian public, potential consumers of art, generally maintained a strong aversion to works they deemed crude, especially those with imagery inspired by Voodoo. This reaction explains why so few people fully appreciated the large murals at the Episcopal Cathedral of the Holy Trinity in Port-au-Prince [44], created in the early 1950s. This project remains to this day the most remarkable effort undertaken by so-called primitive or naïve artists. It was only mentioned once in the press, which did neither praise the achievements of these artists, who were more accustomed to small formats, nor addressed the reluctance it stirred among the faithful of the Episcopal Church of Haiti, reflecting the Christian community’s general dislike of sacred images as too commonly used to represent Voodoo deities.
Jean Claude Garoute (alias Tiga) (1935-2006)
Masque
Aquarelle sur papier
68,6 X 50,8cm (27″ X 20″)
Coll. Particulière
Meanwhile, the modern artists of the Foyer, in an effort to keep their spirits high, exhibited their works regularly, both individually and in groups. Yet criticism was notably absent. For instance, Lucien Price exhibited abstract drawings, and it was Max Pinchinat who noted that “the graphic element is highlighted by rhythm and value modulations.” [45] As for Pinchinat himself, whose exhibitions always drew a crowd, commentary focused mainly on his “remarkable personality” and his “confident” work. He was once praised for his “audacity,” and Morisseau-Leroy even described him as a “revolutionary.” [46]
Around the mid-1950s, the idea of a small artists’ village began to take shape among the members of the Foyer. Although Brochette’s neighborhood never became this envisioned village, the humble place did serve as a hub for Port-au-Prince’s artistic activity for a time. Intellectuals, thinkers, poets, and writers mingled with the artists here, though they did not provide written support or critique, as would have been needed. Still, their discussions marked notable progress. It was during this period that patronage for the arts began, as Haitians increasingly started to engage with local art, showing a particular preference for modern works. However, and as seen earlier, the arrival of modernity in Haitian art had thrown many artists into confusion.
Without understanding the artists’ hesitations, the public had encouraged them to abandon primitive or naïve art—an art they had grown to disdain. While expressing a preference for modern works over traditional forms was an arbitrary, subjective opinion, it would have been preferable for the audience to base their judgments on objective criteria. But who could provide them with this guidance? Not the Centre d’Art, which was widely seen as the source of the problem. As a result, a certain snobbery began to emerge among the public; lacking formal understanding, some celebrated the boldest works, including those of painters who, in an attempt to appear modern and follow trends, incorporated contemporary elements without fully grasping the underlying rules or aesthetic theories. The unfortunate result was that these artists, caught up in confusion, failed to recognize that while a successful career could be financially rewarding, it might also lead to artistic failure.
Charles Obas (1927-1969)
Rara
Huile sur planche synthétique
33 X 40,6cm (13″X 16″)
Coll. Particulière
Modern Haitian art needed to be defined. “Isn’t the fundamental element of our modernity,” Maud G. Robard asked, “alienation, a concern for plagiarism?” [47] Jean Claude Garoute, known as Tiga (1935–2006), shared this concern and envisioned the creation of a “New School” with a distinct pictorial vocabulary rooted in simple forms and stylizations, drawing inspiration from ancient Caribbean pottery and the ritual symbols of Voodoo. For Tiga, these forms and images “immediately and consistently evoke positive, instinctive, uncontrolled reactions in those who observe them.” [48] He put this vision into action the following year, in 1968, by founding the Poto-Mitan Cultural Center in Port-au-Prince.
Jean René Jérôme (1942-1991)
Célébration du corps
Acrylique sur massonite
91,4 X 91,4 (36″ x 36″)
Succession Mireille P. Jérôme
The Haitian public’s interest in this “modern” art often remained superficial; rarely did their observations go beyond a surface level. They often missed the deeper meanings: behind the silent faces, sometimes featureless or masked, and the somber scenes of everyday life lay a sense of anguish and social critique. Similarly, they failed to see that the recurring images of the crucifixion were not meant as religious accusations but rather expressed profound distress, reflective of the country’s political crises. The public perhaps did not realize that, in repressive societies, art often refrains from direct political engagement, for doing so can be too perilous. Thus, the subtle communication between artists and the public becomes a precious means of expression—sometimes the only one available.
For example, in analyzing the works of a small group of artists, certain critics reintroduced the term “beauty.” This group, steering away from the challenging approach of “modern” painters and the unsettling expressions of “cruelty realism,” was seen as pursuing a devotion to the “beautiful.” Thus, they were labeled with the term that still exists today: the “Beauty School.” One might ask what contributed to their success in the industry and why so many young artists joined what they perceived to be a movement.
Paul Claude Gardère (1944- 2011)
Trône et Royaume
Huile sur planchet synthétique
83,82 X 76,20cm (33″x 30″)
Figge Museum, Davenport, Iowa
Affiliated with the Academy of Fine Arts which was founded in 1959, these artists were regarded as professionals with solid training, and their works were assumed to be beautiful by nature. Their compositions, indeed, captivated with graceful shapes, elegant lines, and perfectly balanced colors. Yet, beauty in their art was not an end in itself. Perhaps drawing inspiration from Mallarmé, these artists sought to paint not a subject but the effect it could evoke. They aimed to give art a new purpose, inviting the public into a fresh aesthetic experience where a “subversion of beauty… and a desire for protest” [49] occasionally emerged.
With its rigorous training, the Academy was viewed as an institution created in contrast to the perceived clumsiness of the primitive or naïve style. What the Academy notably avoided was confining its students. Reminding them that “art comes from art,” the Academy freed them from the fear of alienation that the Indigenists had so strongly instilled. Students thus felt free to explore and connect with other artists or groups, knowing that drawing from previous or contemporary creations—whether international or local—was an opportunity to enrich their own work.
Denis Smith (1954 – )
Crucifixion
Acrylique sur toile
76,7 X 60cm (30″ X23″ ½ )
Coll Nicole Lumarque
In the 1970s, artists began expressing themselves in a variety of styles, from abstraction to voodoo-inspired imagery, including dreamlike motifs. This period also saw young Haitians, who had grown up abroad in exile with their families, return after studying in art schools abroad. Eager to participate in what was being called a new golden age, they came back to Haiti. Driven by what some described as a desire to join the lineage of Haitian art, they sought to make their debut at the Centre d’Art, where it was said everything had begun.
Pascale Monnin (1974 -)
Ma chair et les Colibris
Matériaux divers
2m50 d’envergure, environs 8 pieds
Coll particulière
And then came Saint Soleil [Holy Sun], full of promise. It began as an experiment by Jean-Claude Garoute, known as Tiga, who presented the results to André Malraux during his visit to Haiti. Malraux was captivated. The Saint Soleil movement was quickly embraced by foreigners seeking naïve paintings. In reality, it would have been more appropriate to classify the Saint Soleil paintings as “art brut”, as defined by Dubuffet—art that is characterized by strong inventiveness, minimally influenced by traditional artistic conventions and cultural clichés, and created by individuals outside of professional artistic circles. We know the outcome.
Over the past three decades, we have witnessed the rise of mixed techniques and the use of unconventional materials, such as concrete, or repurposed objects, along with entirely new items. The advent of new technologies followed—including digital art. As a consequence, it has become increasingly challenging to differentiate between what is traditionally considered fine arts, decorative arts, and minor arts (crafts).
Celeur Jean Hérard (1966 – )
Sans Titre
Bois et matériaux de récupération
81.3 X 43.2 X 17,78cm (32″ X 17″X 7″) |
Coll. Georges Nader fils
While the Haitian public was just beginning to embrace abstract art, it suddenly faced a wave of new expressions labeled as “contemporary art,” a term that lacks a precise definition beyond “current.” Much of what is presented as “current” often has roots dating back several decades. “Contemporary art” serves as an umbrella term encompassing interdisciplinary works, but it also signifies a rejection of any fixed discipline. This ambiguity creates challenges for critics and, inevitably, for the public, who struggles to adapt and understand its implications. The palpable result is that viewers may feel a sense of inadequacy, leading to the refrain, “It’s not for me,” which reflects a reluctance to engage further in understanding why these new expressions can be considered art and those who create them, artists.
Critics could, however, observe a growing rapprochement between elite culture and popular culture. This was particularly evident in the creation of the musical group Boukman Eksperyans in 1978, which introduced what became known as “root music,” a fusion of North American influences and rhythms deeply rooted in Haitian popular culture. This music gained immense popularity among both young and old, paving the way for other similar musical groups. In the realm of music, this diversity of expression began to challenge the established hierarchy of genres, gradually extending its influence to other artistic disciplines. Initially slow but becoming more pronounced over time, a vibrant culture emerged that was closely connected to everyday life, social issues, and even politics. This new approach facilitated the entry of a broader audience into the context of cultural democratization, leading to demands that did not always align with traditional criteria of excellence and unfortunately opening the door to non-artists.
Young talents with the necessary skills and sensibilities began to transcend established boundaries, questioning the very definition of what constitutes a work of art. What followed was an astonishingly diverse artistic landscape.
Lucien Price (1915-1963)
Étude
Fusain sur papier
25,4 X 35,6cm (10″ X 14″ ½ )
Coll. Particulière
Amid this dynamic evolution, the Haitian public—often without any support—has been continuously engaged. In an effort to guide public choice and support artists, several art galleries have emerged in the area. Although criticized primarily by artists themselves, these galleries have proven to be significant agents in expanding the local clientele, which has had purportedly positive effects on artists’ spirits.
The prices at which their works sell affirm their market recognition and, more importantly, their place within the market. This valuation is also significant to buyers, especially those who view art as an investment. Beyond the artist-buyer relationship, the value of artworks holds strong interest for artists who, contrary to Warhol’s perspective, consider marketability before creation. For many, such information is crucial to the direction of their work. Michèle Montas, a journalist who returned to Haiti in the 1970s, observed a “certain serial painting, lazy and profitable” that had emerged in the art scene. The issue intensified in October 1981 with the competitive exhibition Connaître les Jeunes Peintres [Getting to know the young painters], designed to give young artists a chance to rise above commercial pressures. This initiative aimed to help them present their best work and gain visibility with a Haitian public often indifferent and focused on established profiles. Unfortunately, years later, Louis Dubois, then-president of the Haitian Art Museum Board of Directors, observed a kind of fracture in the art scene, remarking that “we see more imitations, often of artists who have achieved a certain renown.” [51]
Recently, with the emergence of new artistic movements and shifts in the political climate, commercial success has become less certain in Haiti. This reality was noted by members of the Atis Rezistans group, who found themselves thrust into the mainstream without actively seeking it. The Haitian public largely remained indifferent, and the local art critics mainly observed rather than engaged. Despite this, the group’s work—crafted primarily from reclaimed materials—received widespread acclaim in the global North art world and was featured in museums and major exhibitions. These artists hoped above all for improved living conditions, as this openness to international audiences seemed a promising avenue to reach the foreign markets that had historically supported Haitian artist communities [52]. However, despite the enthusiasm of international artistic organizations and collectors, this support rarely translated into significant acquisitions. Yet, despite the challenges, Celeur Jean Hérard expressed his resilience: “Although I cannot make a living from my art, I feel happy. My work is admired, and because of this, I can endure all the hardships.” [53]
Gérald Alexis
[1] Indigenism, initially a literary movement, expanded into the visual arts following a pivotal encounter in 1931 between the American painter William Scott—who had come to Haiti on a grant to paint its people and landscapes—and the emerging Haitian artist Pétion Savain (1906–1975). Soon, Georges Remponeau (1916–2012) and other painters of similar backgrounds joined the movement. Coming from Haiti’s bourgeoisie, they had received varied training, whether in formal schools, within family circles, or through private or correspondence courses. Their distinct temperaments and unique life circumstances significantly shaped their careers, leading each on a divergent path. The movement quickly extended beyond the capital to provincial towns, inspiring artists from more modest social backgrounds.
[2] Artistic productions which, for the most part, were products of art teaching at secondary school level, mainly congregational, with foreigners as teachers.
[3] Scott was an African-American painter who received a grant to come and paint in Haiti.
[4] Le Nouvelliste, Port-au-Prince, Haiti, February 23, 1932.
[5] Marcello Da Silva, in Les Griots, Port-au-Prince, Haiti, No.1, Vol.1, July, August, September 1938, p 75
[6] Anonymous, “The talent of Pétion Savain: Opinion of two American artists”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, April 15, 1932.
[7] This painting is now in the collection of the Art Museum of the Americas (AMA), Washington DC.
[8] Henri Ch. Rosemond, “The Opening of the New York Exhibition”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, May 10, 1939, pp.1-4.
[9] Savain is the author of the novel La case de Damballah, Imprimerie de l’État, Port-au-Prince, 1939.
[10] Max Martinez, “The exhibition of Paintings at the Art Center”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, May 25, 1944, p.2.
[11] Brought by the Cuban José Gomez Sicré, the exhibition was previously presented at the Museum of Modern Art in New York.
[12] José Gomez Sicré, in “Foreword”, The Art of Haiti by Eleanor Ingalls Christensen, A.S. Barnes & co, South Brunswick and New York, 1972, p.10.
[13] Hector Ambroise, “Culture, Art and Folklore”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, June 23, 1948.
[14] Lucien Price, “Exhibitions of the month: the Bottex Exhibition”, Studio 3, Le Centre d’Art, Port-au-Prince, No.3, April 1946..
[15] Unfortunately, Studio 3 did not have a long life. Only three issues were produced.
[16] Michel Philippe Lerebours, “Haiti and its painters, from 1804 to 1980”, L’Imprimeur II, Port-au-Prince, 1989, p.225.
[17] Extract from a text by Dewitt Peters, translated by Louis Dubois, and published by Gérald Alexis in “40 years ago, the Art Center: The Arrival of the Primitives”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, Haiti, May 14, 1984, pp. 3-7.
[18] In her work De la Plástica Cubana y Caribeña (1990), Cuban art historian Yolanda Wood observes that this experience demonstrated how intuitive creation fosters greater spontaneity and freedom of expression, ultimately enabling the emergence of a distinctly Cuban art.
[19] This interview was published in the catalog of the exhibition Art of Haiti and Jamaica, Center for Inter-American relations, New York, 1968, p.72.
[20] Luis M. Castañeda, “Island Culture Wars: Selden Rodman and Haiti”, Art Journal, 2014, 73:3, pp.58-59.
[21] Press note on the occasion of the exhibition Naive Art of Haiti, The Carol Reese Museum, East Tennessee State University, Johnson city, 1967.
[22] Selden Rodman quoted by Paul Wagoner in “The Haitian Miracle”, Contemporary Times, Chicago, May 1988, p.8.
[23] Mark Stevens, “Black Magic”, Newsweek, September 18, 1978, p.68.
[24] Stevens, ibid.
[25] In Art and Culture: “In conversation with the painter Roland Dorcely”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, April 17, 1984, p.8.
[26] Fraënel in Art Center – Father Parisot Exhibition, Aya Bombé, No.7, Port-au-Prince, Haiti, April 1947, p.7.
[27] Lucien Price, “Exhibition by Maurice Borno, Luce Turnier and Raoul Dupoux”, Studio 3, No 5, April 1946.
[28] Rimbo, “I don’t understand”, Maniguet, Port-au-Prince, first year No 2, December 2, 1944, p. 8.
[29] Author unknown, ”An exhibition of primitive Haitian artists in Keys West”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, January 19, 1949, p.1.
[30] Max Pinchinat, exhibition leaflet at the Art Center, Port-au-Prince, January 1949.
[31] “Foundation of the Foyer des Arts Plastiques”, Le Nouvelliste, August 17, 1950, p.1.
[32] “Ms. Paul Magloire exhibits her paintings”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, September 21, 1950, p.1.
[33] Lerebours, p.11.
[34] Jean Chenet, A look through Haitian painting, Brochure of the exhibition Foyer des Arts Plastiques, Port-au-Prince, September 17, 1950.
[35] Lerebours, Vol. II, p.16.
[36] Selden Rodman, The Insider, Louisiana University Press, 1960, p.63.
[37] Antonio Joseph, quoted by Julie Jensen in Quad-Citians host famed Haitian Artists, photocopy of an article without reference to the name and date of publication.
[38] Transcription found in the archive of Pierre Monosiet, assistant to Dewitt Peters, of an interview given in New York by Emmanuel Ledan to Mr. Russell, on the occasion of the exhibition of the painter Hector Hippolyte at the American British Center in New York in January 1948.
[39] Philippe Thoby Marcelin, Panorama of Haitian Art, Imprimerie de l’État, Port-au-Prince, 1956, p.43.
[40] Robert Klein, “Les Arts: René Exumé”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, September 27, 1958, p.1.
[41] Jacques Stephen Alexis, “Dieudonné Cédor, painter of the people”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, January 31, 1958, p.1.[42] Jacques Stephen Alexis, Dieudonné Cédor, peintre du peuple, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, 31 janvier 1958, p.1
[42] Coumbite is a reference, applied to the Haitian artistic community, to the traditional Haitian custom of the same name, which consists in the collaboration of individuals sharing the same interests and who make available for free, in order to produce a specific task, their work force and their means of production to one of the members of the group for a limited time.
[43] Dieudonné Cédor, quoted by Michel Philipe Lerebours in “Commerce, scaffolding and wound of Haitian painting”, Coumbite, Port-au-Prince, No.2, December 15, 1957.
[44] The sentence of the Head of the Episcopal Church of Haiti, Mgr Alfred Voegeli: “Thank God they painted Haitian”, which was not published in the American press, also indicates that this project, even at the risk of displeasing the faithful, wanted to give voice to the primitive/naïve artists, seen as the only ones capable of creating authentically Haitian art.
[45] Max Pinchinat, “Presentation of the Pinchinat, Price, Noble exhibition”, Palais des Beaux-arts, Cité de l’Exposition, March 5, 1951.
[46] Felix Morisseau Leroy, “Max Pinchinat”, Le Matin, Port-au-Prince, January 20, 1955.
[47] Maud Guerdes Robart, “An angel passes by an exhibition”, Le Nouveau Monde, Port-au-Prince, May 25, 1973.
[48] Jean Claude Garoute, “For a modern Haitian art”, Bulletin Artistique, Port-au-Prince, March 26, 1967.
[49] Pascale Romain, “When Bernard Séjourné and Jean René Jérôme subvert beauty”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, June 20, 2008.
[50] Michèle Montas, “Contemporary Haitian Art”, Le Nouvelliste, Port-au-Prince, May 28, 1973.[51] Montas, Michèle, Art contemporain Haïtien in Le Nouvelliste, Port-au-Prince, le 28 mai 1973
[51] Louis Dubois, “Towards the reopening of the Haitian Art Museum at Collège Saint-Pierre?”, Le Nouvelliste, January 26, 2015.
[52] I am referring here to the primitive/naïve movement of the 1940s/50s and the Saint Soleil experience of the 1970s.
[53] Lena Iñurreita Rodriguez, “The Grand Rue of Haitian Artists”, Anales del Caribe, Casa de las Americas, La Havane, 2007, p.182-183.
Gérald Alexis is an art historian currently residing in Quebec, Canada. He has served as the director of the Musée National d’Haïti (MUPANAH) and the Haitian Art Museum at Collège Saint-Pierre. A member of the International Council of Museums (ICOM), he holds a master’s degree in Latin American and Caribbean art from the University of Texas at Austin. Alexis has curated numerous national and international exhibitions and has lectured at cultural institutions and universities across Europe, the Caribbean, and North, Central, and South America. He is the author of Peintres haïtiens and Artistes haïtiens (Cercle d’Art, Paris) and has written several monographs on Haitian artists, as well as numerous essays and critiques for exhibition catalogs, magazines, newspapers, and websites. He is also a member of the International Association of Art Critics (Caribbean section) and the Institut Canadien de Québec.
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