Dynamisme de la photographie guyanaise : en attendant la biennale d’Amazonie

ELINE GOURGUES

Karl Joseph est le directeur artistique des Rencontres Photographiques de Guyane et le directeur général de l’association La Tête dans les Images. L’interview a été réalisée à l’occasion de l’exposition Territoire Inventé présentée au sein du Collectif Foto Ativa à Belém au Brésil, initialement prévue à l’occasion de la première biennale d’art contemporain d’Amazonie. Cependant, cette dernière n’a pas eu lieu par faute de moyens et d’acteurs culturels. L’association La Tête dans les Images a tout de même décidé de maintenir l’exposition car il était important de continuer à lier ces territoires limitrophes (Guyane et Brésil) par le biais de manifestations artistiques. Bénéficiant de fonds de coopération internationale, l’association La Tête dans les Images œuvre à créer des projets dans une dynamique continentale pour créer une cartographie artistique ancrée dans son territoire. Ainsi, n’est-il pas devenu une nécessité de soutenir la création du plateau des Guyanes – et des pays limitrophes – étant un territoire bénéficiant du soutien financier des politiques publiques ? 

Vue de l’exposition Julie Boileau

Bonjour Karl, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? 

Karl Joseph, je suis photographe depuis 2005. Je travaillais dans le tourisme auparavant mais j’ai décidé de tout quitter pour me consacrer à la photographie. J’ai surtout travaillé pour la presse dans diverses revues. En 2011, j’ai été contacté par la région Guyane en la personne d’Elisabeth Lama pour monter un festival, celui des Rencontres Photographiques de Guyane car le Conseil régional avait la volonté de construire son propre festival. Nous avons travaillé avec elle  pendant trois ans. Parallèlement , j’ai créé l’association La Tête dans les Images en 2012. À partir de 2013, l’association a présenté le festival seule parce que c’était  trop compliqué administrativement de le gérer avec la région Guyane. 

Depuis, j’alterne la direction artistique du festival, la direction de l’association et puis des travaux personnels comme photographe en Guyane. C’est en quelque sorte mon terrain de jeu documentaire. 

Quel a été l’objet de l’association La Tête dans les Images à sa création ?

L’association au départ a été créée pour porter administrativement le festival, puis petit à petit, celle-ci a choisi de se diversifier avec l’envie de rester dans ses statuts de promotion de la photographie en Guyane en incluant un fort pôle de médiation culturelle. Une bonne partie de nos visiteurs, de nos bénéficiaires, sont des jeunes de moins de 25 ans -50% de la population guyanaise ayant moins de 25 ansIl nous a paru important d’avoir ce volet médiation de façon à pouvoir  discuter avec ces jeunes et développer l’éducation à l’image. 

Quelle a été la genèse du projet d’exposition Territoire inventé à Belém au Brésil,  présenté au sein du lieu du collectif Foto Ativa ? 

Ce projet développe deux aspects . Le premier collaboratif et artistique, puisque nous avions commencé à travailler avec le collectif Foto Ativa pour la biennale des rencontres en 2021. Nous avions exposé une rétrospective de 34 ans d’existence, ils avaient carte blanche pour proposer une exposition en extérieur en lien avec la thématique du festival : « Juste à côté de nous l’Amazonie ? » Le second consistait à bénéficier de leur expertise en médiation culturelle et de leur conception d’atelier de rue en les faisant venir lors du festival  pour qu’ils puissent avoir un cycle d’ateliers de rue dans Cayenne. Cependant, au moment du festival, même si la période du covid avait pris fin, la frontière avec le Brésil était toujours fermée. Nous n’avons pas réussi à les faire venir et nous avons ressenti une certaine frustration de ne pas terminer l’opération que nous avions mise en route avec eux.

D’où l’idée de proposer un nouveau projet pour continuer la collaboration. Connaissant l’existence des fonds de coopération culturelle, nous avons décidé d’aller à leur rencontre en proposant une exposition de photographes guyanais qui se déroulerait chez eux. 

Vue de l’exposition

Tu es commissaire de l’exposition, peux-tu nous présenter les artistes de l’exposition et son propos  ? 

Les artistes présentés sont Mathieu Kleyebe Abonnenc, Julie Boileau, Mirtho Linguet, Daphné Le Sergent et moi-même. L’idée de l’exposition était de présenter des artistes d’Amazonie, de parler d’un territoire que nous partageons.

Il était important de continuer l’amorce de dialogue autour de l’exposition en 2021 lors de la biennale et de cette exposition en juillet 2022 avec cette idée de Territoire inventé, c’est-à-dire un territoire imaginaire, photographique qui resterait à inventer entre nos territoires. Ce projet nous a permis d’entamer ensemble une recherche de ce que pourrait être la photographie amazonienne. C’était ça l’idée, de façon simple. Aller à la rencontre de nos partenaires, découvrir  la scène de Belém qui est une scène vraiment vibrante, une des plus actives du Brésil. C’était très intéressant de la découvrir à travers ce projet. Nous savions qu’elle était dynamique grâce au collectif Foto Ativa, mais ce qui a été intéressant lors des 5-6 jours de montage, du vernissage et des rendez-vous, c’est aussi de rencontrer des personnes actives dans le domaine de la photographie et de pouvoir discuter avec elles des problématiques similaires sur les questions associatives et l’organisation d’évènements sur nos territoires. Cela était riche et très pertinent. 

Justement, vis-à-vis de cette réelle problématique d’organiser des expositions et des événements sur le territoire amazonien, comment s’est déroulé le montage de l’exposition ? Les artistes ont-ils pu venir sur le territoire ?

La plupart des artistes ne pouvaient pas se déplacer soit pour des raisons médicales car le vaccin contre la covid-19 était nécessaire entre les deux territoires soit pour des raisons professionnelles

Nous y sommes allés avec une partie des œuvres, par la route, car la frontière était enfin  rouverte, mais il n’y avait  toujours pas d’avion entre Cayenne et Belém. Il nous a fallu trois heures de taxis jusqu’à Saint-Georges, une traversée en pirogue jusqu’à Oyapock sous une pluie battante, ensuite nous avons attendu le bus pour dix-sept heures de route jusqu’à Macapa, enfin l’attente de l’avion et une heure d’avion de Macapa à Belém. Ce n’était pas évident. Nous sommes restés cinq  jours à Belém avec deux jours de voyage aller, deux jours de voyage retour. 

Nous avons fait produire l’autre partie des œuvres à Belém, la bonne surprise a été de trouver un tireur très professionnel, hyper bon, des tirages de très bonne qualité avec un laboratoire et un atelier compétent. C’est un prestataire qui travaille avec beaucoup de photographes.

En réalité, en partant de Guyane, nous n’avions pas pris en compte que Belém est un grand territoire, près de un  million sept-cent  mille habitants. C’était très intéressant de se retrouver dans cette urbanité brésilienne et de s’apercevoir que nous avons tout intérêt à travailler avec eux, car nous avons beaucoup à apprendre d’eux comme ils ont beaucoup à apprendre  de nous : c’était intéressant de pouvoir échanger nos expériences sur la photo et sur l’organisation d’évènements photos.   

Vue de l’exposition. Mirtho Linguet

Quelles sont les nouvelles perspectives et collaborations avec le collectif FOTOATIVA ou la scène artistique de Belém ? 

La prochaine perspective serait l’organisation d’un colloque autour de la photographie amazonienne, ou, en tout cas, autour de ce que pourrait être la photographie amazonienne. L’idée serait  qu’à travers la création de la Maison de la Photographie de Guyane-Amazonie , de voir si on peut faire émerger une photographie amazonienne et quelle serait sa forme ? Quelles seraient ses préoccupations ? De pouvoir aussi, entre pays limitrophes, continuer ce dialogue, continuer cette collaboration, mettre les artistes en contact et pouvoir, pour nous, en tant que Maison de la Photographie de Guyane-Amazonie,  devenir un point de rencontres des acteurs de la photographie sur la zone du plateau des Guyanes et plus largement le territoire Amazonien que nous partageons notamment avec le Brésil. Nous souhaitons voir sur quoi les artistes photographes travaillent, quels sont leurs centres d’intérêt et comment les accompagner ? La scène est relativement riche donc ce n’est pas le problème de l’émergence des travaux parce que, par exemple en Guyane et au Brésil, nous irons également  bientôt aussi au Surinam et au Guyana , il y a de nombreux photographes et des  travaux qui existent malgré un manque évident de moyens. Comment est-ce qu’on peut faire connaître et diffuser sur une plus large échelle l’ensemble de ces travaux. 

Quelle est votre politique de projet hors-les murs sachant les problématiques de mobilités qui existent ? 

Il y a deux choses par rapport à ça, la première est qu’on n’évitera pas les difficultés de circulation, liées à la pauvreté des routes entre l’ensemble des pays qui occupent le plateau des Guyanes et le nord du Brésil qui constituent une des régions les plus pauvres du pays. D’ailleurs il y a urgence quand on voit qu’il y a une augmentation de plus de 75% de la déforestation depuis l’arrivée de Bolsonaro, il y a un nombre effrayant de leaders amérindiens assassinés ces dernières années donc il y a urgence à parler de cette zone géographique. Mais nous  n’éviterons pas ces difficultés d’autant plus que le prix du transport va augmenter. Nous  n’allons pas y échapper mais nous trouverons  toujours un moyen de les contourner pour poursuivre ces échanges.

Ensuite, l’idée de la Maison de photographie de Guyane-Amazonie  serait de lancer un autre projet qui serait virtuel avec lequel nous continuerons ces échanges pour enrichir l’expérience virtuelle, aller plus loin grâce à l’outil Internet. 

Vue de l’exposition

Merci beaucoup Karl. Cela me permet d’évoquer la préparation de la prochaine biennale dont l’ouverture est prévue en novembre 2023 : quelle sera la thématique abordée ? 

Pour la thématique de la prochaine biennale, nous nous inspirons de la phrase d’Edouard Glissant :  Notre paysage est son propre monument. 

Après avoir parlé de l’Amazonie lors de la précédente édition, l’idée était aussi de documenter ces paysages amazoniens. C’est-à-dire que nous nous inscrivons dans une continuité sur l’ensemble des thématiques et des biennales, toujours dans cette envie de construire un corpus de photos autour du territoire dans lequel nous vivons. Nous nous intéressons à ces paysages avec aussi la vision quasi obligatoire aujourd’hui, c’est  à dire la vision écologique. 

L’ensemble des territoires que nous connaissons en Guyane sera amené à changer avec les futurs bouleversements des dix  prochaines années. L’idée est de réfléchir à ce bouleversement à travers la notion de paysages en photographie : parler de paysages amazoniens, de paysages sociaux, de paysages urbains. Nous souhaitons laisser une place aux photographes à travers nos résidences et aux commissaires associés qui nous parleront de leur vision de ce paysage photographique.

Il existe des affinités entre le Lumbung et l’habitus aux Caraïbes. Traditionnellement, la population Carib (l’un des groupes autochtones pré-coloniaux de la région caribéenne) pratiquait un principe de partage similaire défini par le concept de Kayapa 16. Dans les espaces urbains modernes Caraïbéens, les cours (et les arrière-cours de ses maisons) opèrent également comme des lieux sociaux et créatifs. À Trinidad en particulier, la cour est un espace vernaculaire dans lequel on se rassemble 17, dans lequel on crée et on intervient. C’est l’un des lieux principaux du liming 18 et de la confection de costumes pour le carnaval. The Yard (La Cour) est donc conçu comme un espace en transition, dans lequel la collectivité sociale cohabite avec la créativité, en faisant ainsi un « espace de possibilités » 19 multi-site. Le projet Alice Yard, né dans une arrière-cour de Woodbrook, a depuis déplacé son espace de travail au Granderson Lab de Belmont. À travers ce mouvement logistique, le collectif a commencé à identifier son propre mode de fonctionnement comme une conversation et un processus ne reposant pas seulement sur un site ou une localisation physique spécifique, mais plutôt comme un espace de conversations formé par l’action collective. Le Yard a également décidé de s’étendre vers l’espace virtuel, en devenant un espace en ligne organisant des conversations internationales. À travers l’acte de concevoir le Yard comme un processus vernaculaire restaurateur de lien social et d’action collective, Alice Yard contraste délibérément la recherche ontologique et nostalgique d’authenticité et de motif culturel de présentation, et applique son système de valeurs aux créations et aux besoins contemporains.

Vue de l’exposition

Pouvez-vous  présenter ce programme de résidence évoqué et les commissaires associé(e)s ? 

Cette année, nous avons choisi de travailler avec quatre commissaires associés . Nicola Lo Calzo  proposera six expositions et trois résidences dans le cadre de Foto Kontré qui est un programme d’échanges entre la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane. Ce sera la troisième édition de ce programme en partenariat avec La Station Culturelle (Martinique) et Les Amis d’Artistik Rézo (Guadeloupe). Nous avons invité également Estelle Lecaille, commissaire belge qui vient proposer un regard sur la photographie belge avec deux résidences dans l’ouest guyanais à  Saint Laurent du Maroni et Awala

Ensuite, nous avons choisi de travailler avec Mathieu Kleyebe Abonnenc sur la notion de résistance. Dans la mesure où l’on parle de paysage de changement, de destruction, il nous paraissait important de parler des lieux de résistances, des poches de résistances qui ont existé en Guyane contre le colonialisme. Lors de la dernière édition nous avions invité le philosophe Malcolm Ferdinand qui avait évoqué cette non-rencontre entre les combats de décolonisation et les combats écologiques. Nous continuerons d’explorer cette question des différentes résistances guyanaises à travers cette exposition. Puis nous travaillerons avec un quatrième commissaire d’exposition, ce sera la quatrième fois avec lui, Victor Zebo, directeur artistique de l’association Guyane Art Factory. Il nous proposera une programmation vidéo autour de la thématique du festival. 

Nous organisons toujours le festival autour de trois axes ; un axe de création avec  les commissaires d’expositions, un axe patrimonial pour pallier le déficit d’images en Guyane. Le public a besoin de se voir et nous tâcherons de combler ce manque à travers des commandes, des résidences mais aussi en révélant des archives de la photographie guyanaise avec l’aide  

des photographes amateurs guyanais. Avant la seconde guerre mondiale, les photos étaient prises par des personnes venant de l’extérieur,  par des étrangers.   

Enfin la médiation sera notre dernier axe puisque nous accueillerons des scolaires pour des  visites guidées pendant le festival. Nous travaillerons avec eux tout au long de l’année dans des ateliers dont nous restituerons les productions lors du festival. C’est un pan important du travail associatif de la Maison de la Photographie de Guyane – Amazonie. 

1 Le Discours antillais, Paris, Seuil, 1981, p. 21.

Eline Gourgues

Diplômée de l’Université Lumière Lyon2 et de l’Université Rennes 2, Eline Gourgues est aujourd’hui coordinatrice générale de l’Association La Station culturelle de Martinique et chargée de développement de l’association La Tête dans les images qui organise les Rencontres photographiques de Guyane.

Casa de la Fotografía Guayana-Amazonia
Dinamismo de la fotografía guayanesa en la prefiguración de una futura bienal de la Amazonia

ELINE GOURGUES

Karl Joseph es director de la bienal Rencontres Photographiques de Guyane [Encuentros Fotográficos de Guayana] y director general de la asociación La Tête dans les Images [Pensando las imágenes]. La entrevista fue realizada en el marco de la exposición Territoire inventé [Territorio inventado], presentada en la sede del colectivo Foto Ativa en Belén, Brasil, prevista inicialmente en la ocasión de la primera bienal de arte contemporáneo de la Amazonia. Sin embargo, esta última no pudo suceder por falta de medios y de agentes culturales. Pese a ello, la asociación La Tête dans les Images decidió inmediatamente mantener la exposición en pie, ya que era importante dar continuidad al vínculo entre estos territorios vecinos (Guayana y Brasil) a través de las manifestaciones artísticas en la región. Beneficiaria de fondos de cooperación internacional, la asociación La Tête dans les Images se enfoca en la creación de proyectos desde una dinámica continental que parte de una cartografía artística anclada sobre su territorio. De este modo, ¿acaso no se ha vuelto necesario apoyar la creación artística de Guayana —así como de sus países colindantes—, siendo éste un territorio beneficiado por los apoyos financieros de políticas públicas?

Vue de l’exposition Julie Boileau

Buen día, Karl, ¿podrías presentarte en pocas palabras?

Mi nombre es Karl Joseph, soy fotógrafo desde 2005. Trabajé en el periodismo con anterioridad, pero decidí dejarlo todo para dedicarme a la fotografía. He trabajado sobre todo para la prensa de diversas revistas. En 2011, fui contactado por la región Guayana, a través de Elisabeth Lama, para montar un festival. Se trataba de la bienal Rencontres Photographiques de Guyane, una iniciativa del Consejo Regional. Hemos trabajado con ellos desde hace tres años. Paralelamente, fundé la asociación La Tête dans les Images en 2012. Y, desde 2013, la asociación ha realizado el festival de manera autogestiva, ya que, administrativamente, resultaba complejo organizarlo junto con el Consejo de Guayana.

 

De este modo, alterno la dirección artística del festival, la dirección de la asociación, además de otros trabajos personales como fotógrafo en Guayana. 

¿Qué fue lo que motivó la creación de la asociación La Tête dans les Images?

La asociación fue creada desde el inicio para gestionar administrativamente el festival. Poco a poco, la asociación ha preferido diversificarse con el deseo de prevalecer como promotora de la fotografía en Guayana, incluyendo un sólido centro de mediación cultural. Una buena parte de nuestros visitantes son jóvenes de menos de 25 años —50% de la población guayanesa tiene menos de 25 años. Era importante para nosotros contar con este componente de mediación y poder debatir con los jóvenes en el desarrollo de una educación en torno a la imagen.

¿Cómo comenzó el proyecto expositivo Territoire inventé en Belén, Brasil, presentado en la sede del colectivo Foto Ativa?

Este proyecto explora dos aspectos. Siendo el primero colaborativo y artístico, ya que comenzamos a trabajar con el colectivo Foto Ativa para la bienal Rencontres en 2021. Expusimos una retrospectiva de sus 34 años de existencia; el colectivo tenía la libertad de presentar una exposición al aire libre vinculada con la temática del festival: Juste à côté de nous l’Amazonie ? [Justo a nuestro lado, ¿la Amazonia?]. 

El segundo aspecto consistió en volver a su experiencia en mediación cultural, trayéndolos al festival para desarrollar un ciclo de talleres en las calles de Cayena. Sin embargo, en el contexto del festival, aún cuando el periodo de la COVID-19 había terminado, la frontera con Brasil estuvo todo el tiempo cerrada. Nunca nos rendimos en traerlos, pero sí sentimos cierta frustración de no poder terminar la gestión que ya habíamos arrancado juntos.

Así surgió la idea de proponer un nuevo proyecto para continuar nuestra colaboración. Sabiendo de la existencia de fondos para la cooperación cultural, decidimos proponer conjuntamente una exposición de fotografía guayanesa que tendría lugar en su sede. 

Como curador de la muestra, ¿podrías comentar sobre los artistas que formaron parte de la misma y su planteamiento? 

Los artistas presentados fueron Mathieu Kleyebe Abonnenc, Julie Boileau, Mirtho Linguet, Daphné Le Sergent y yo mismo. La idea de la exposición fue presentar artistas de la Amazonia para hablar de ese territorio que compartimos.

Era importante continuar el diálogo detonado en torno a la exposición de 2021, durante la bienal, con esta muestra en julio de 2022. Partimos de la idea de un territorio inventado, es decir, un territorio imaginario, fotográfico, que habría que inventar entre nuestras tierras. Este proyecto nos permitió comenzar una búsqueda conjunta de aquello que puede ser la fotografía amazónica. Este fue el propósito de la muestra, dicho de una manera simple. Participar en el encuentro con nuestros compañeros y dialogar con la escena vibrante de Belén —una de las más activas de Brasil. Fue bastante interesante vivirlo a través de este proyecto. Gracias al colectivo Foto Ativa sabíamos que la escena era ya dinámica, pero lo interesante fueron los cinco o seis días de montaje, la inauguración y las reuniones, pues fueron espacios para discutir con personas activas dentro de la práctica fotográfica sobre problemáticas en común en torno al trabajo colectivo y la organización de eventos dentro de nuestros territorios. Eso fue bastante enriquecedor y pertinente. 

Justamente, frente a esta problemática tan vigente en la organización de exposiciones y eventos sobre el territorio amazónico, ¿cómo se desenvolvió el montaje de la muestra? ¿Los artistas pudieron visitar la región?

La mayoría de los artistas no pudieron venir; bien por motivos de salud, ya que es necesario estar vacunado contra la COVID-19 para desplazarse entre ambos territorios, o bien por motivos profesionales. 

 

Fuimos por una parte de las obras por carretera ya que la frontera estaba al fin re-abierta, pero todavía no habían vuelos diarios entre Cayena y Belén. Tuvimos que tomar tres horas de taxis para llegar a Saint-Georges, una travesía en canoa bajo la lluvia torrencial para llegar a Oyapock, después esperamos el autobús para un viaje de 17 horas hacia Macapá, finalmente esperamos el avión y tras una hora de viaje llegamos a Belén. No estaba claro. Nos quedamos cinco días en Belén, después de dos días para llegar ahí y dos días más para volver. Logramos producir el resto de las obras en Belén. La gran sorpresa fue que encontramos un buen impresor profesional, con un trabajo de gran calidad, y un laboratorio y taller competentes. Es un prestador de servicios que trabaja con bastantes fotógrafos en la zona. 

En realidad, desde Guayana, no nos habíamos dado cuenta cuán grande es el territorio de Belén —con casi 1,700,000 habitantes. Fue muy potente encontrarse con la urbanidad brasileña y enfatizar el gran interés de trabajar juntos. Hemos aprendido mucho de ellos y ellos de nosotros: es importante poder hacer intercambios sobre nuestras experiencias sobre la fotografía y la organización de eventos sobre la misma.

Vue de l’exposition. Mirtho Linguet

¿Cuáles son los nuevos proyectos y colaboraciones con el colectivo Foto Ativa o la escena artística de Belén?

Nuestro próximo proyecto es la organización de un coloquio alrededor de la fotografía amazónica o, en todo caso, alrededor de eso que puede ser la fotografía amazónica. La idea es que, a través de la creación de la Casa de la Fotografía Guayana-Amazonia, emerja más fotografía amazónica y entendamos cuáles podrían ser sus formas, sus preocupaciones. También nos gustaría continuar el diálogo entre países limítrofes, las colaboraciones, poner a los artistas en contacto y poder, nosotros como casa de la fotografía, convertirnos en un punto de encuentro entre los agentes de la fotografía sobre el Escudo de las Guayanas y, más ampliamente, el territorio amazónico que compartimos con Brasil. Deseamos ver sobre qué están trabajando los artistas de la fotografía, cuáles son sus intereses, y poder acompañarlos en el proceso. La escena es relativamente rica, el problema no es la producción de nuevos trabajos ya que, por ejemplo, en Guayana y en Brasil —por supuesto que pronto iremos igual a Suriname y a Guyana— hay muchísimos fotógrafos y trabajos que existen pese a una falta evidente de medios. ¿Cómo es que podemos hacer visibles y difundir a una más grande escala el conjunto de estos trabajos?

¿Cuál es tu política para proyectos fuera de casa tomando en cuenta las problemáticas de movilidad existentes?

Hay dos cuestiones que tomar en cuenta. La primera es que no podemos evitar las dificultades de la circulación vinculadas con la escasez de rutas entre los países que conforman al Escudo Guayanés y el norte de Brasil, el cual a su vez constituye una de las regiones más pobres del país. Asimismo, hay urgencias respecto al aumento de más del 75% de la deforestación desde la llegada de Bolsonaro, y la cantidad de líderes amerindios asesinados es alarmante. A esto debe sumarse el aumento de los costos de transporte. Por todo esto es necesario hablar de esta zona geográfica. No vamos a escapar de estas problemáticas, pero buscaremos maneras de abordarlas y seguir nutriendo los intercambios.

Así, la Casa de la Fotografía Guayana-Amazonia buscará lanzar un proyecto diferente y en línea a través del cual continuaremos generando intercambios para enriquecer la experiencia virtual y hacerla llegar más lejos gracias a la practicidad del internet.

Vue de l’exposition

Muchas gracias, Karl. Esto me permite recordar la preparación de la próxima bienal cuya apertura está prevista en noviembre de 2023: ¿qué temática se va a abordar?

Para la temática de la próxima bienal nos hemos inspirado en una frase de Édouard Glissant: Nuestros paisajes son monumentos propios.

Después de hablar de la Amazonia en la edición anterior, la idea era también documentar estos paisajes amazónicos. Es decir, mantenemos una continuidad entre temáticas y bienales, siempre con el deseo de construir un cuerpo de fotografías sobre el territorio que habitamos. Nos interesamos por estos paisajes también desde la visión casi obligatoria del presente: la visión ecológica.

El conjunto de territorios que conocemos en Guayana está en un proceso de cambios tras los futuros convulsos de los próximos diez años. La idea es reflexionar sobre estas agitaciones a través de la noción de paisajes fotográficos: hablar de paisajes amazónicos, de paisajes sociales, de paisajes urbanos. Queremos dar cabida a los fotógrafos a través de nuestras residencias, así como a curadores asociados que compartan sus visiones sobre ese paisaje fotográfico.

Il existe des affinités entre le Lumbung et l’habitus aux Caraïbes. Traditionnellement, la population Carib (l’un des groupes autochtones pré-coloniaux de la région caribéenne) pratiquait un principe de partage similaire défini par le concept de Kayapa 16. Dans les espaces urbains modernes Caraïbéens, les cours (et les arrière-cours de ses maisons) opèrent également comme des lieux sociaux et créatifs. À Trinidad en particulier, la cour est un espace vernaculaire dans lequel on se rassemble 17, dans lequel on crée et on intervient. C’est l’un des lieux principaux du liming 18 et de la confection de costumes pour le carnaval. The Yard (La Cour) est donc conçu comme un espace en transition, dans lequel la collectivité sociale cohabite avec la créativité, en faisant ainsi un « espace de possibilités » 19 multi-site. Le projet Alice Yard, né dans une arrière-cour de Woodbrook, a depuis déplacé son espace de travail au Granderson Lab de Belmont. À travers ce mouvement logistique, le collectif a commencé à identifier son propre mode de fonctionnement comme une conversation et un processus ne reposant pas seulement sur un site ou une localisation physique spécifique, mais plutôt comme un espace de conversations formé par l’action collective. Le Yard a également décidé de s’étendre vers l’espace virtuel, en devenant un espace en ligne organisant des conversations internationales. À travers l’acte de concevoir le Yard comme un processus vernaculaire restaurateur de lien social et d’action collective, Alice Yard contraste délibérément la recherche ontologique et nostalgique d’authenticité et de motif culturel de présentation, et applique son système de valeurs aux créations et aux besoins contemporains.

Vue de l’exposition

¿Podrías abonar sobre este programa de residencia del cual hablas y los curadores asociados?

Este año, decidimos trabajar con cuatro curadores asociados. Nicola Lo Calzo propondrá seis exposiciones y tres residencias en el marco de Foto Kontré, que es un programa de intercambio entre Guadalupe, Martinica y Guayana. Esta será la tercera edición de este programa realizado en colaboración con La Station Culturelle en Martinica y Les Amis d’Artistik Rézo en Guadalupe. También invitamos a Estelle Lecaille, curadora belga que propone una mirada sobre la fotografía en Bélgica, en conjunto con dos residencias en el oeste guayanés, en Saint Laurent du Maroni y Awala. 

Del mismo modo, trabajaremos con Mathieu Kleyebe Abonnenc sobre la noción de resistencia. En medida que hablamos de paisajes de cambios, de destrucción, también nos parecía importante hablar de lugares de resistencia, de trincheras que han existido en Guayana contra el colonialismo. En la última edición invitamos al filósofo Malcom Ferdinand, quien nos había mencionado este no-encuentro entre las luchas de decolonización y las luchas ecológicas. Seguiremos explorando estas preguntas en torno a distintas resistencias y las posibilidades de deconstruir el capitalismo anticolonial guayanés a través de esta exposición. Posteriormente trabajaremos con un cuarto curador, esta será nuestra cuarta colaboración con él: Victor Zebo, director artístico de la asociación Guyane Art Factory. Él propondrá una programación de video alrededor de la temática del festival.

Siempre organizamos el festival alrededor de tres ejes: un eje de creación junto con los curadores de las exposiciones, un eje patrimonial para afrontar el déficit de imagen en Guayana. El público busca verse en las imágenes, y nosotros apostamos por combatir esa falta a través de comisiones, de residencias, pero también para revelar los archivos de la fotografía guayanesa con la ayuda de fotógrafos jóvenes guayaneses. Antes de la segunda guerra mundial, las fotografías eran tomadas por personas del exterior, extranjeros.

Finalmente, la mediación es nuestro tercer eje, ya que invitaremos a académicos para dar visitas guiadas durante el festival. Trabajamos con ellos a lo largo del año a través de talleres en los que compartimos la estructura del festival. Este es un pilar del trabajo colaborativo de la Casa de la Fotografía Guayana-Amazonia. 

Eline Gourgues

Diplômée de l’Université Lumière Lyon2 et de l’Université Rennes 2, Eline Gourgues est aujourd’hui coordinatrice générale de l’Association La Station culturelle de Martinique et chargée de développement de l’association La Tête dans les images qui organise les Rencontres photographiques de Guyane.